Conseil des Musulmans de Belgique : enfin un “non” ministériel qui fait du bien !
Majdi Fatima Zahra
Annelies Verlinden, ministre belge de la Justice, a osé faire ce que beaucoup pensaient tout bas sans jamais oser le dire tout haut , elle a refusé de reconnaître le nouveau Conseil des Musulmans de Belgique (CMB). Un geste salutaire, presque thérapeutique, dans cette comédie institutionnelle où une ASBL, armée de bulletins de vote confidentiels et de statuts vaguement inclusifs, prétendait parler au nom de tout l’islam belge. Rien que ça.
Une ASBL représentative ? Non merci.
Il faut dire les choses franchement : depuis quand une ASBL devient-elle le porte-voix de toute une communauté religieuse ? Oui, les statuts étaient prêts. Oui, il y avait un logo. Et oui, quelques réunions Zoom ont dû donner l’impression d’un élan démocratique. Mais soyons sérieux , ce CMB fraîchement élu ne représente pas grand monde – sauf lui-même, ses membres, et quelques ambitions bien senties.
On nous parle de 60 à 65 % des mosquées représentées. Mais d’où sort ce chiffre ? D’un rapport auto-écrit, auto-validé, et surtout auto-complaisant. Même Excel aurait demandé une deuxième vérification. En vérité, les grandes institutions musulmanes belges, celles qui ont pignon sur rue et parfois même une vraie salle de prière (oui, ça aide), ont été royalement ignorées lors du processus électoral. L’élégance du mépris dans toute sa splendeur.
Représentativité asymétrique et arithmétique douteuse
Ah, et parlons chiffres , 45 francophones pour 15 néerlandophones. Un déséquilibre digne d’un cours de mathématiques sous influence linguistique. Comment expliquer cette répartition inéquitable dans un pays qui s’est construit sur la subtile gymnastique communautaire ? On dirait que le CMB s’est cru à une assemblée générale de quartier à Saint-Josse. Sauf qu’il est censé parler pour tout le pays.
Une prolongation… pour tout changer ?
La ministre Verlinden a donc décidé de prolonger le mandat du Conseil temporaire d’un an. Scandale ? Pas vraiment. Ce n’est pas une prolongation des mêmes têtes ni des mêmes méthodes. C’est une façon de dire , “On ne vous croit pas, recommencez, mais sérieusement cette fois.” Une année pour revoir les critères, ouvrir la porte aux vraies structures, aux mosquées qui existent ailleurs que sur papier, et surtout, pour éviter qu’une poignée de noms choisis entre cousins ne devienne la voix officielle de 600 000 musulmans.
Le journaliste Bouchaib El Bazi, fin connaisseur des coulisses de l’islam institutionnel en Belgique, ne cache pas son scepticisme :
“Ce n’est pas parce qu’un groupe se proclame ‘représentatif’ qu’il l’est. Il y a eu exclusion volontaire de fédérations sérieuses, des manipulations électorales, et une opacité totale sur les candidatures. Le processus manque de légitimité et de transparence. La ministre a pris la bonne décision. Elle sauve peut-être le peu de crédibilité qu’il restait à l’idée même d’un Conseil des musulmans de Belgique.”
Et il a raison. À trop vouloir imposer une gouvernance sans base populaire ni transparence, on risque surtout de creuser le fossé entre les institutions et les fidèles. L’islam de Belgique mérite mieux qu’un club fermé d’auto-désignés.
Q
Le refus de reconnaissance n’est pas un échec. C’est une alerte. Un rappel qu’on ne s’improvise pas représentant communautaire dans un État de droit. Et surtout pas quand on transforme un processus électoral en dîner privé.
La ministre Verlinden n’a pas bloqué l’islam de Belgique. Elle a peut-être, au contraire, ouvert une porte pour enfin construire une structure légitime, représentative et respectée. En espérant que l’année de répit ne serve pas à recycler les mêmes noms dans une autre ASBL avec un logo neuf.
À suivre : le CMB sortira-t-il un nouveau communiqué en lettres capitales ? Ou enverra-t-il un mail collectif pour se féliciter entre eux ? Mystère… et cafetière.