Bruxelles, capitale du racket légal , quand le stationnement devient une arnaque municipale
À Saint-Josse, petite commune bruxelloise célèbre pour ses trottoirs trop étroits et ses panneaux trop ambigus, Hajar Baguia a vécu ce que tout automobiliste bruxellois finira, un jour ou l’autre, par expérimenter , le choc brutal entre le bon sens citoyen et l’absurdité réglementaire. Un soir, à 20h00, elle gare sa voiture sous un panneau indiquant clairement « payant de 7h à 15h ». Elle pense être dans les règles. Le lendemain, elle découvre une amende. Le piège s’est refermé.
Le panneau, pourtant, ne ment pas. Il ne dit pas toute la vérité non plus, nuance bruxelloise oblige. La commune lui explique, d’un ton technocratique et dédaigneux , « après 15h, c’est une zone verte, donc payante jusqu’à 21h ». Pourquoi cette précision n’apparaît-elle pas sur le panneau ? « Parce que c’est logique », répond l’administration. Logique pour qui ? Pour les initiés du code sacré de Bruxelles Parking, visiblement. Pas pour les citoyens normaux, ceux qui croient naïvement ce qu’ils lisent.
Hajar proteste, appelle, argumente. Mais à Saint-Josse, on ne débat pas. On encaisse. « La contravention ne sera pas annulée », lui assène-t-on froidement. Et pour faire bonne mesure, on lui explique qu’elle peut attendre les rappels, mais que les huissiers finiront par venir. Charmant. Elle voulait comprendre, elle a eu droit à une menace voilée. Quand l’administration devient un call center d’intimidation, on atteint des sommets kafkaïens.
Mais ne soyons pas naïfs. Ce n’est pas une erreur ponctuelle. C’est un système. Car derrière les contraventions en série, il y a une machine bien huilée , Brussels Parking, entreprise publique à but non caritatif, qui transforme chaque coin de rue en jackpot légal. Leur spécialité ? La signalisation floue, les horaires piégeux, les règles modulables selon les communes. Et surtout, un partenariat tacite avec certaines municipalités qui ferment les yeux sur les abus, trop contentes de partager le butin.
À Bruxelles, ce ne sont plus les automobilistes qui cherchent une place, ce sont les communes qui cherchent comment leur en faire payer trois. La zone verte est un gouffre gris ; la zone bleue, une illusion de liberté ; et les zones rouges ? Inutile d’en parler, elles sont là pour l’estocade finale.
Les habitants, eux, n’ont qu’une seule option , payer, contester en vain, ou déménager. La transparence de l’espace public se dissout dans l’opacité tarifaire. Et la justice administrative ? Elle regarde ailleurs, pendant que les compteurs tournent.
Hajar, elle, ne demande pas l’annulation miraculeuse de son amende. Elle demande juste qu’on n’écrive pas “jusqu’à 15h” quand on pense “jusqu’à 21h”. Un peu de clarté dans ce brouillard tarifaire. Mais à Bruxelles, la clarté, ça ne rapporte rien. Mieux vaut un panneau flou et une contravention certaine, qu’une signalisation honnête et des recettes en baisse.
La ville lumière, c’était Paris. Bruxelles, elle, préfère les zones d’ombre.