Toujgani revient : le retour du prédicateur qui faisait trembler l’État

Bouchaib El Bazi

En Belgique, l’histoire politique s’écrit parfois avec des rebondissements dignes d’un feuilleton turc. Après avoir été expulsé manu militari en janvier 2022, accusé de radicalisme et d’ingérence au profit du Maroc (excusez du peu), voilà que l’imam Mohamed Toujgani est à nouveau le bienvenu. Oui, vous avez bien lu : le prédicateur, exfiltré comme un espion soviétique, pourra désormais revenir librement, valise à la main et passeport belge en poche.

Quand la justice dit “amen” au prédicateur

La Cour de cassation, dans un élan d’indépendance judiciaire ou de surréalisme très belge, vient de rejeter le pourvoi de l’État belge contre sa naturalisation. Autrement dit : l’homme que l’on disait trop proche de Rabat pour prêcher à Molenbeek est désormais 100% belge, avec tous les droits civiques qui vont avec — sauf peut-être celui de prêcher dans le JT.

Pendant trois ans, Toujgani a médité au soleil marocain, probablement entre deux tajines, en attendant que la Belgique se ravise. Et voilà que le pays qui l’avait banni lui déroule désormais le tapis rouge juridique. Le ministre de l’Intérieur doit avoir la migraine.

Espion, prédicateur ou symbole ?

Car enfin, qui est vraiment Mohamed Toujgani ? Pour certains, un imam influent ; pour d’autres, une sorte de carte postale vivante envoyée directement par les services marocains. L’État belge avait préféré jouer la prudence, version expulsion express. Mais visiblement, les juges ont décidé qu’on ne retire pas si facilement la nationalité à un homme, fut-il suspecté de théologie trop géopolitique.

Un retour qui en dit long

Ce retour met en lumière un État belge parfois schizophrène : prompt à dénoncer les ingérences étrangères, mais souvent désarmé face à ses propres procédures. On expulse d’une main, on naturalise de l’autre. Et entre les deux ? Un imam, devenu malgré lui symbole d’une démocratie en débat avec elle-même.

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