Mohamed Ameur à Bruxelles : un ambassadeur, un soldat… et un fin connaisseur des cocktails diplomatiques
Bouchaib El Bazi
Dans le grand théâtre de la diplomatie internationale, certains ambassadeurs arrivent en poste avec des bouquets de fleurs, d’autres avec des discours bien ficelés. Mohamed Ameur, lui, est arrivé à Bruxelles avec une valise pleine de dossiers, une plume bien affûtée et une résistance à toute épreuve aux coups bas médiatico-politiques. Ancien ministre délégué chargé des Marocains résidant à l’étranger, ce géographe devenu diplomate a été parachuté au cœur de l’Union européenne non pas pour faire du tourisme, mais pour livrer bataille.
La guerre des mots dans la capitale de la diplomatie
Dès son arrivée, Ameur a compris que Bruxelles n’était pas simplement le paradis du chocolat et de la bière artisanale. C’est aussi – et surtout – un champ de mines diplomatiques, où chaque mot peut devenir une grenade. Face aux attaques parfois gratuites, souvent téléguidées, contre l’intégrité territoriale du Maroc, il n’a pas sorti le drapeau blanc. Au contraire, il a sorti la Convention de Vienne, quelques rapports d’ONG bien choisis, et une verve digne d’un vieux briscard du Parlement européen.
Quand certains médias belges tentaient de lui coller l’étiquette de diplomate trop zélé, Mohamed Ameur répondait calmement, avec des faits, des chiffres et ce ton tranquille mais ferme qui rend fou les agitateurs professionnels. Oui, il parle des droits humains. Oui, il parle de la Kabylie et de Ghardaïa. Et non, ce n’est pas un sujet tabou. Il le fait d’ailleurs en citant… Human Rights Watch. On a vu moins bien préparé.
Un ambassadeur qui connaît ses classiques… et ses ennemis
Ce n’est pas un hasard si le roi Mohammed VI a confié à Mohamed Ameur un poste aussi stratégique que sensible. L’homme connaît le terrain, et mieux encore, il connaît ses adversaires. L’Algérie ? Il la suit à la trace depuis les années 70. Le Parlement européen ? Il en a fait un terrain de jeu géopolitique où il manie l’art de l’influence comme un chef d’orchestre, sans fausses notes.
Il ne se contente pas de briller dans les salons dorés : il forme les consuls, mobilise la diaspora, déconstruit les narratifs hostiles, et si besoin est, corrige poliment un ministre belge en direct. Comme ce jour où il a recadré Vincent Van Quickenborne au sujet de la gestion des mosquées marocaines. Le tout sans hausser le ton, mais en haussant le niveau.
Un professeur dans l’arène
Ce n’est pas un diplomate de carrière, c’est pire : c’est un intellectuel. Docteur d’État en aménagement urbain, professeur d’université, membre actif de plusieurs réseaux scientifiques… L’homme a la tête bien faite, et il s’en sert. Ce qui, dans les cercles diplomatiques parfois anesthésiés par les éléments de langage, relève presque de la subversion.
Il ne vend pas du rêve, il défend une réalité. Celle d’un Maroc stable, progressiste, et profondément attaché à ses valeurs. Celle d’un pays qui ne se laisse plus définir par les rapports biaisés ou les résolutions orientées. Et s’il faut rappeler que le Sahara est marocain, il le fera. Encore et encore. Avec conviction, sans provocation.
Ni naïf, ni radical, juste stratège
Ce diplomate atypique, à mi-chemin entre le militant et le professeur, est aussi un socialiste modéré. Il redoute l’extrémisme religieux autant que les dérives autoritaires, et croit à une seule arme pour défendre les sociétés ouvertes : la démocratie. Une position rare, d’autant plus précieuse qu’elle ne se proclame pas en slogans, mais se prouve dans l’action.
À 65 ans, Mohamed Ameur n’a pas perdu la fougue des jeunes loups, mais il a gagné la patience des vieux lions. En poste à Bruxelles, il défend la cause nationale comme un général d’état-major, maniant aussi bien le stylo que le protocole.
Un ambassadeur au bon endroit, au bon moment
À une époque où la diplomatie ressemble parfois à un concours de formules vides, Mohamed Ameur fait figure d’exception. Il ne cherche pas à plaire, il cherche à convaincre. Il ne fuit pas le débat, il le provoque même, parfois. Et surtout, il incarne une certaine idée du Maroc : fier, ouvert, lucide… et résolument souverain.