De la “Nouvelle Algérie” à l’ancienne tambouille : enquête sur les dérives paranoïaques du président Tebboune

Bouchaib El Bazi

En matière de communication politique, certains préfèrent les discours rassembleurs, d’autres les bains de foule. Le président algérien Abdelmadjid Tebboune, lui, semble avoir opté pour une autre méthode : le kidnapping diplomatique, le harcèlement transfrontalier et le whisky (jusqu’à récemment). Une spécialité maison, servie chaude par Le Journal du Dimanche dans une enquête qui fait l’effet d’un triple espresso au cœur de l’Elysée.

À en croire les révélations explosives publiées le 10 mai, le président Tebboune ne se contente pas de gouverner un pays en pleine déprime économique et politique : il orchestre aussi — personnellement, s’il vous plaît — des opérations clandestines pour neutraliser ses opposants, que ce soit en Algérie, en Espagne, ou sur le sol français. Oui, vous avez bien lu : on parle ici de diplomates qui font du James Bond au rabais, de barbouzes déguisés en touristes, et de kidnapping de YouTubers en plein Paris. Si la situation n’était pas aussi grave, on en ferait une série Netflix.

Opération “Retour au Bled”, version Tebboune

Au centre du feuilleton : Amir DZ, ennemi public n°1 du président, exilé en France, amateur de vidéos mordantes et, visiblement, d’une capacité incroyable à faire monter la tension artérielle à Alger. En avril 2024, une tentative d’enlèvement visant ce trublion tourne au fiasco hollywoodien : un diplomate algérien est arrêté, la DGSI s’en mêle, et Paris découvre qu’on joue aux espions sur son territoire sans l’avoir prévenue.

Mais selon l’enquête, cette affaire n’est que l’arbre qui cache une forêt de dérives autoritaires : écrivains, journalistes, poètes (même les poètes, oui), tous sont dans le viseur d’un pouvoir devenu obsessionnel. Bilan : plus de 250 prisonniers d’opinion, des accusations de “financement du terrorisme” distribuées comme des tickets de métro, et une paranoïa d’État qui ferait rougir la Stasi.

“Chouïa sensible”, le président

Tebboune, affectueusement surnommé “Ami Tebboune” par ses soutiens, est dépeint par Le JDD comme un homme impulsif, instable, et… en sevrage. Après avoir frôlé la mort du Covid en 2020, le président aurait dû renoncer à ses habitudes : deux paquets de clopes par jour et quelques bons verres de whisky. Depuis ? Il pique des colères homériques, vire ses collaborateurs pour un froncement de sourcil mal placé, et transforme toute critique en casus belli. Un ancien ministre résume : “Soit il vous aime, soit vous êtes mort.”

Algérie, mode “Game of Thrones”

Le récit s’étoffe avec une galerie de personnages qui semblent tout droit sortis d’un thriller politique : le général “Sadiq”, alias Rachid Fethi Moussaoui, patron des opérations extérieures de la DGDSE, amateur de luxe et d’intrigues ; Mohamed Wassim Ablaoul, surnommé “Abdelghani”, nouveau visage des sales besognes à Paris ; et enfin Boualem Boualem, bras droit présidentiel, distributeur officiel d’intimidations et d’enveloppes.

Tous liés par un objectif : faire taire les voix dissidentes, peu importe le prix, la légalité ou le ridicule. Et pendant ce temps, le régime proteste avec une sincérité qui frôle le génie comique : “Nous respectons la souveraineté française”. Bien sûr. Comme une sauterelle respecte un champ de blé.

La diplomatie du chaos

Le plus étonnant dans tout cela ? C’est l’amateurisme avec lequel ces opérations sont menées. Enquêteurs français et espagnols n’ont même pas eu besoin d’écouter aux portes : les agents algériens ont laissé des preuves dignes d’un manuel de débutant. L’un a oublié de brûler sa voiture de filature, un autre s’est fait filmer en train d’embarquer un opposant. Les scénaristes de Bureau des Légendes en pleureraient de honte.

une Algérie “nouvelle” à l’ancienne

À l’heure où l’Algérie célèbre (ou pas) les promesses d’une “nouvelle république”, c’est un vieux réflexe qui refait surface : faire taire, humilier, exiler. Mais cette fois, avec la touche Tebboune : personnelle, émotionnelle, et passablement alcoolisée. Ce n’est plus de la politique. C’est une vendetta d’État.

Reste à savoir jusqu’où la France — et l’Europe — toléreront cette petite république de la terreur exportée. En attendant, à Alger comme à Paris, on serre les dents… et les portables.

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