Bart De Wever : 100 jours à Bruxelles, et toujours vivant (mais pas forcément convaincant)

Bouchaib El Bazi

Il paraît qu’on reconnaît les grands hommes d’État à leur capacité à rester calmes dans la tempête. Bart De Wever, lui, a choisi d’emménager directement dans l’œil du cyclone : Bruxelles. Cent jours plus tard, l’interview accordée à RTL info nous laisse un curieux arrière-goût — quelque part entre le monologue d’un coach de crossfit fatigué et le bilan d’un capitaine de navire sans boussole, mais avec beaucoup d’avis.

Budget : l’art de diagnostiquer sans prescrire

Première victime de ce grand oral : le budget. De Wever dénonce, chiffre, dramatise. Il parle d’un déficit de 45 milliards d’euros, de faillite imminente, de “travail titanesque”… Bref, c’est l’Apocalypse selon Bart. Sauf que, il dépeint un mur sans proposer d’échelle. L’équation budgétaire ? Elle ne tient pas. La Banque nationale elle-même n’y croit pas. De Croo, l’ancien Premier, pourrait presque en rire : être battu dans la catégorie “élève en détresse budgétaire” par son successeur, voilà qui mérite un prix.

Politique étrangère : du chaud, du froid, et beaucoup de tiédeur

Côté politique étrangère, l’exercice vire à la contorsion. Interpellé sur la reconnaissance de l’État palestinien, De Wever temporise. Pas tant que le Hamas est au pouvoir. Une position “difficilement tenable”, surtout en pleine tragédie humanitaire à Gaza. Même dans son propre camp, des voix s’élèvent. Mais Bart tient bon, droit dans ses bottes diplomatiques, quitte à se les prendre dans le tapis géopolitique.

En revanche, l’Ukraine, c’est son terrain de certitude. De Wever loue les sacrifices du peuple ukrainien, les décrit comme un rempart contre les chars russes — et comme un argument béton pour justifier l’augmentation des dépenses militaires. Deux pour cent du PIB pour la Défense ? Pas un caprice, une nécessité. Même si cela suppose, selon lui, un “travail infernal” à boucler d’ici un an. Bruxelles n’est peut-être pas une zone de confort, mais l’OTAN non plus, apparemment.

Trump, toujours là, toujours imprévisible

Et puisqu’on parle de turbulences, impossible d’éviter la question Trump. Refroidi par le milliardaire orange ? “Non”, tranche De Wever, “je suis atlantiste, et l’atlantisme est plus grand que Trump”. Noble. Mais il concède que l’ancien président est une boîte à surprises… souvent mauvaises. Protectionnisme, populisme, imprévisibilité : tout y passe. Reste que les États-Unis demeurent, selon lui, l’allié incontournable — en attendant qu’une Europe plus autonome daigne sortir de ses 30 ans de somnolence stratégique.

Bruxelles, ce n’est pas Anvers (et ça se voit)

Enfin, la touche humaine, la larme presque : De Wever évoque avec émotion la photo de son bureau vidé à l’Hôtel de Ville d’Anvers. Il dit avoir quitté sa “zone de confort” pour répondre à l’appel du peuple — flamand d’abord, mais aussi wallon, ajoute-t-il, tout étonné qu’au sud aussi, certains aient voté pour le changement. Sauf que le changement, ce n’est pas seulement un devoir, c’est un programme. Et là, on attend encore.

100 jours, beaucoup de formules, peu de solutions

Bart De Wever aura passé ses 100 premiers jours à diagnostiquer, commenter, alerter, mais rarement à agir. Il veut sauver la Belgique d’un naufrage budgétaire, d’un effondrement stratégique, d’un vide moral… Mais pour l’instant, on navigue toujours à vue. Le capitaine est sur le pont, oui, mais la carte reste floue, et la destination incertaine.

 

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