TRIBUNE — De Marrakech aux plateaux télé : quand Georges-Louis Bouchez célèbre le Maroc… avant de le mépriser

Par Lamin Yamina

Le week-end dernier, les réseaux sociaux vibraient au rythme du soleil marocain, des dîners luxueux et des balades en quad dans les dunes de Marrakech. À l’occasion des 40 ans de l’animatrice RTL Émilie Dupuis, une trentaine de personnalités belges ont été conviées à vivre la dolce vita sous les palmiers du royaume. Parmi elles : Georges-Louis Bouchez, président du MR, labaya soigneusement choisie, sourire affiché, prêt pour la story Instagram. Marrakech ? Un décor parfait. L’accueil ? Chaleureux, évidemment. Le personnel ? Majoritairement marocain. La main-d’œuvre discrète mais essentielle à cette fête haute en couleur.

Mais à peine une semaine plus tard, retour sur les plateaux de télé belges : changement de ton. Les mots sont durs, les postures intransigeantes. Voilà que ces mêmes Marocains, une fois franchie la Méditerranée pour tenter de vivre dignement en Belgique, deviennent subitement des « profiteurs », des « assistés », voire des menaces pour notre sécurité sociale. Les déclarations ciblent sans nuance : l’immigration maghrébine, les quartiers populaires, les jeunes en rupture.

L’hypocrisie d’un double discours

Ce contraste interpelle. Car derrière les paillettes de Marrakech, une question s’impose : comment peut-on à la fois jouir des services et de l’hospitalité d’un peuple… puis participer au lynchage politique de cette même communauté dès que celle-ci tente d’exister ici, chez nous ?

Georges-Louis Bouchez, qui ne manque jamais une occasion de vanter sa modernité et son ouverture, semble oublier qu’un homme politique se mesure aussi à sa cohérence. L’homme qui se prélasse dans une villa marocaine, en labaya, servi par du personnel local, semble ne pas voir, ou feint de ne pas voir, que ce personnel a des frères, des cousins, des enfants en Belgique. Qu’eux aussi travaillent, étudient, payent leurs impôts. Qu’eux aussi tombent malades, perdent leur emploi, ou rêvent simplement d’acheter un bien, ici ou là-bas. Et qu’à chaque fois qu’ils lèvent la tête, qu’ils osent parler, c’est à eux qu’on dit de « fermer leur bouche ».

Le MR, entre silence complice et mépris affiché

J’ai, comme beaucoup d’autres, tenté de contacter à plusieurs reprises des élus du MR sur ces contradictions. Aucune réponse. Rien. Un silence pesant, révélateur. Peut-être faut-il comprendre que la diaspora marocaine ne mérite ni attention, ni égards ? Qu’elle est bonne à servir les tables à Marrakech, mais indésirable lorsqu’elle prend la parole en Belgique ?

Ce mépris de classe et de race, aussi sournois qu’il soit, ne passe plus inaperçu. Il cristallise une fracture de plus en plus profonde entre une certaine élite politique et des citoyens belges d’origine étrangère, fatigués de devoir sans cesse prouver leur loyauté à une patrie qui, souvent, les ignore ou les soupçonne.

L’heure de la reddition de comptes

Georges-Louis Bouchez devra un jour répondre à cette contradiction : peut-on être invité d’honneur d’un peuple le week-end, puis en être le bourreau médiatique la semaine suivante ? Peut-on aimer le Maroc pour ses paysages et sa cuisine, mais détester les Marocains dès qu’ils deviennent voisins, collègues ou patients ?

Notre diaspora n’a pas à s’excuser d’exister. Elle n’a pas à se taire lorsqu’elle est stigmatisée. Et elle n’a pas à accepter que les mêmes qui profitent de sa culture l’attaquent sans relâche lorsqu’elle tente de s’élever.

Les Marocains de Belgique méritent mieux que le silence. Ils méritent le respect, la considération, et surtout : la vérité.

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