Kidnapping d’Amir DZ: les renseignements extérieurs algériens dans le viseur des enquêteurs de la police française
Majdi Fatima Zahra
L’enlèvement le 29 avril dernier à Paris de l’opposant et blogueur algérien Amir Boukhors, plus connu sous le nom d’Amir DZ, fait actuellement l’objet d’une enquête de la police judiciaire française. Il s’agit d’identifier les commanditaires de ce rapt, mais aussi ses auteurs déguisés en policiers français, ce qui n’est pas sans rappeler les méthodes tordues utilisées par les généraux algériens dans leurs crimes de la décennie noire des années 90, et vers lesquels un doigt accusateur est déjà pointé.
C’est un nouvel échec que le général Djebbar Mhenna, ancien taulard et actuel patron des renseignements extérieurs algériens (DDSE), vient d’enregistrer après le kidnapping en plein Paris de l’opposant et blogueur algérien, Amir Boukhors, très connu sur les réseaux sociaux sous le nom d’Amir DZ. Cette tentative, qui avait pour fin d’extrader cet opposant vers l’Algérie, a lamentablement foiré. Pire: ses commanditaires sont aujourd’hui sur la sellette en France.
Dans son édition du mardi 21 mai, le site Africa Intelligence rapporte que la police judiciaire de Villejuif (Val-de-Marne), dans la région parisienne, enquête actuellement sur les dessous de l’«enlèvement, violences et séquestration du blogueur et opposant algérien Amir Boukhors, plus connu sous le pseudonyme d’Amir DZ».
Ce dernier a été enlevé dans la nuit du 29 au 30 avril dernier près de son domicile, par des hommes cagoulés, qui l’ont drogué, menotté et séquestré pendant 27 heures dans un lieu isolé à l’orée de la capitale française. Le plus troublant, c’est que le rapt de Boukhors a coïncidé avec l’arrestation quasi concomitante en France, quelques heures plus tôt, du blogueur attitré des services de renseignements algériens, Said Bensedira, qui se trouvait à Paris au même moment, alors qu’il réside habituellement à Londres. Bensedira a été interpellé, placé en garde à vue puis sous contrôle judiciaire, alors qu’il s’apprêtait à prendre un vol à destination de l’Espagne, pays vers lequel certains observateurs affirment qu’Amir Boukhors allait y être probablement convoyé avant d’être transféré en Algérie.
Ce qui est certain, c’est que la police judiciaire française est d’autant plus encline à enquêter sur cet enlèvement que ses sigles, dont des brassards, ont été utilisés par les ravisseurs en vue de tromper la vigilance de la victime, la mettre en confiance et annihiler toute résistance de sa part.
Or, une telle mise en scène (voitures avec gyrophares et port de brassards) et le déguisement avéré en policiers français dont se sont rendus coupables les ravisseurs d’Amir Boukhors ne sont pas sans rappeler la méthode des faux barrages de la décennie noire que l’armée algérienne, déguisée en «Groupes islamistes armés» ou «groupes de la mort», dressait dans le double objectif d’éliminer certains opposants et commettre des actes barbares visant à entretenir un climat de peur favorable à son emprise sur le pays.
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Djebbar Mhenna, un protagoniste de sinistre mémoire de la décennie noire, est-il en train d’agir aujourd’hui en France comme en territoire conquis en y rééditant les méthodes de terreur que lui et les toujours actifs généraux Toufik Mediène, Said Chengriha, Nasser El Djinn, Abdelkader Mejahed… ont appliquées en Algérie durant les années 90 qui ont fait plus de 200.000 morts et des milliers de disparus? En tout cas, tant qu’ils n’ont pas mis la main sur Amir Boukhors en particulier, les généraux algériens resteront sur leur faim de sanguinaires insatiables. Car Amir Boukhos, ce blogueur et opposant politique très suivi sur les réseaux sociaux par des millions de ses compatriotes, est leur bête noire et l’homme à abattre. C’est ce qui explique que le régime algérien a émis à son encontre une dizaine de mandats d’arrêt internationaux en l’accusant de tous les crimes, «terroristes» et autres, et en le condamnant devant plusieurs tribunaux locaux par contumace à de nombreuses et lourdes peines, dont la perpétuité et la condamnation à mort.
Lors de sa visite en Algérie, du 25 au 27 août 2022, le président français Emmanuel Macron a été surpris par l’hystérique insistance d’Abdelmadjid Tebboune et des généraux algériens, qui l’ont imploré de leur livrer Amir Boukhors et le journaliste Hichem Aboud.
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Après avoir promis diplomatiquement de faire tout ce qui est en son pouvoir dans ce dossier, Macron a finalement laissé le droit dire son dernier mot, quand les juges français ont refusé toute extradition des opposants algériens, avant d’accorder, en octobre dernier, le statut de réfugié politique et la protection à Amir Boukhors.
Le fait que la police française ouvre une enquête «pour enlèvement, violences et séquestration» d’Amir DZ est lourd de sens et signifie que les barbouzes diligentés par Djebbar Mhenna ont laissé bien trop d’indices qui laissent peu de doutes sur les commanditaires du rapt raté. Cela est aussi indicateur d’une colère des autorités françaises à l’adresse du régime d’Alger qui est en train d’exporter ses méthodes mafieuses en France.