Algérie : Tebboune indésirable en France
Si la visite d’Etat que devait effectuer le 2 mai dernier le président algérien, Abdelmadjid Tebboune, a été annulée du côté algérien par les véritables décideurs du pays, à savoir les généraux d’une armée de plus en plus influente sur la scène politique, cette fois l’annulation vient du côté français où l’on estime que le président algérien ne remplit pas les critères qui lui permettent d’effectuer une visite d’Etat à Paris.
De nombreux griefs sont retenus contre le représentant de la junte militaire algérienne véritable détentrice du pouvoir dans un pays plongé dans la spirale de la répression de toute contestation politique et / ou sociale. Entre autres raisons qui font de Tebboune indésirable en France, les incessantes violations des droits de l’homme commises dans un pays où tout doit obéir au doigt et à l’œil au tout puissant pouvoir militaire. Pas un seul jour ne passe sans que des citoyens ne soient incarcérés pour de fallacieuses accusations « d’incitation à attroupement non armé », « atteinte à la sécurité de l’Etat » et « atteinte à corps constitué » etc.
Plus de 500 personnes croupissent, aujourd’hui, dans les geôles du duo Tebboune-Chengriha et plus de 2000 autres sont en sursis. 51 militants politiques ont été condamnés à la peine capitale et une vingtaine d’autres condamnés à perpétuité. Jamais les violations des droits humains n’avaient atteint pareil niveau dans la région du Maghreb comme aujourd’hui en Algérie. C’est ce qui fait dire à un ancien militant « l’Algérie qualifiée jadis de Mecque des révolutionnaires est, aujourd’hui, le tombeau des révolutionnaires ».
Outre les violations des droits humains, il est reproché à Alger beaucoup d’incohérences dans la conduite de ses relations avec la France. Si Tebboune se montre conciliant voire complaisant à l’égard de la France, du côté des militaires on a tendance à garder une certaine hostilité vis-à-vis de l’ancienne puissance coloniale. Juste pour entretenir le fond de commerce d’une armée qui se veut montrer patriotique face à un peuple unanimement antimilitariste.
Tout récemment, un faux scoop élaboré dans les officines des services de renseignements, publié par deux quotidiens de la presse nationale, mettait dans le même sac « la France et les deux ennemis traditionnels, le Maroc et Israël dont les services secrets s’étaient réunis en Israël pour arrêter un plan de déstabilisation de l’Algérie en provoquant des troubles dans 4 départements algériens, Alger, Oran et les deux importantes villes de la Kabylie Tizi-Ouzou et Bejaïa » selon les concepteurs de ce Fake. De nombreux observateurs ont vu dans « ce complot franco-israélo-marocain, tiré par les cheveux » une volonté des militaires de parasiter la prochaine visite de Tebboune à Paris et surtout discréditer Tebboune aux yeux de son « ami » Macron ». Quoique l’on dise, ils ont réussi dans leur manœuvre. Même le locataire de l’Elysée ne croit plus en Tebboune. « A quoi bon signer des accords et des protocoles avec un homme qui ne décide de rien et qui est incapable de tenir ses promesses » se serait dit Emmanuel Macron.
Finalement, Tebboune a réussi l’exploit de se mettre à dos les forces politiques françaises qui ne veulent pas de lui et ses sponsors militaires qui veulent torpiller ses relations, aussi fragiles soient-elles, avec le président français. Cette nouvelle annulation de la visite qu’il devait effectuer à Paris vient dans le prolongement d’une autre annulation. Celle de Moscou. Poutine, très au fait des secrets des arcanes du régime algérien, n’a pas jugé utile de recevoir un Tebboune hésitant ne sachant pas dans quels bras se blottir. Tantôt il jette son dévolu sur Macron. Tantôt il joue à fond la carte russe en dépensant le plus gros du budget de son armée dans la ferraille russe tout en faisant les yeux doux à Washington.
Tout compte fait, Tebboune novice en matière de diplomatie ne sait pas exactement sur quel pied danser et se comporte comme un citoyen lambda dans le monde des grands. Ainsi, après son absence forcée au sommet de la Ligue Arabe à (les Saoudiens lui ont exprimé clairement qu’ils ne voulaient pas de sa présence à Djeddah), et après avoir été ignoré par le BRICS qu’il voulait intégrer, Tebboune essuie deux nouveaux revers diplomatiques, à savoir l’annulation de ses visites à Moscou et à Paris.
Des revers qu’il tente d’effacer en faisant croire aux Algériens que l’obtention d’un siège de membre non permanent au Conseil de Sécurité de l’ONU est un énorme succès diplomatique. Pourtant ce siège est obtenu sans la moindre opposition et sans le moindre effort.