Le revers algérien : L’Union européenne inscrit l’Algérie sur la liste noire du blanchiment d’argent
Bouchaib El Bazi
Dans un nouveau coup dur pour le régime militaire algérien, la Commission européenne a annoncé ce mardi l’actualisation de sa liste des pays à haut risque en matière de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme. Une mise à jour qui n’est pas passée inaperçue , alors que les Émirats arabes unis en sortent, l’Algérie y fait son entrée fracassante, aux côtés de dix autres pays, dont le Liban, la Côte d’Ivoire ou encore le Venezuela.
Cette inscription confirme les doutes persistants au sein des instances internationales quant à la transparence du système financier algérien, et jette une ombre supplémentaire sur un pays déjà englué dans des crises structurelles profondes, où le contrôle réel du pouvoir échappe aux institutions civiles au profit d’un appareil sécuritaire opaque.
Une alerte rouge européenne
Selon le document officiel de la Commission européenne, dont Parlement.com affirme détenir copie, l’Algérie figure désormais parmi les juridictions nécessitant une “vigilance renforcée”. Cette classification signifie que les flux financiers en provenance ou à destination du pays sont désormais considérés comme présentant des risques significatifs de blanchiment d’argent ou de financement d’activités illicites.
Pour les entreprises algériennes opérant à l’international, cette décision pourrait avoir des conséquences immédiates , ralentissement des transactions, restriction des mouvements bancaires, surveillance accrue des transferts de fonds, voire rupture de certaines coopérations commerciales ou bancaires.
L’Algérie, nouveau foyer d’opacité ?
La décision de Bruxelles repose sur une évaluation technique et indépendante, menée avec le soutien du Groupe d’action financière (GAFI). Plusieurs signaux d’alarme avaient déjà été émis ces derniers mois concernant l’absence de mécanismes efficaces en Algérie pour identifier les bénéficiaires effectifs des sociétés, le manque de coopération judiciaire, ainsi que l’utilisation de circuits parallèles pour la sortie illicite de devises.
« Ce classement vient entériner une réalité que beaucoup d’observateurs dénonçaient depuis longtemps , l’Algérie est un système à double vitesse, où l’économie formelle sert souvent de paravent à des circuits souterrains liés aux élites militaires et à leurs réseaux d’influence », commente le journaliste Bouchâib El Bazzi.
Silence gêné à Alger
Alors que plusieurs pays figurant sur la liste, comme le Liban ou le Venezuela, ont aussitôt réagi par voie diplomatique ou médiatique, Alger, fidèle à sa posture défensive, a préféré garder le silence. Ce mutisme trahit une gêne manifeste au sommet de l’État, à l’heure où l’image extérieure du régime connaît une érosion croissante.
« Le régime algérien est piégé dans une logique d’enfermement diplomatique. Il refuse toute remise en question interne, et réagit à chaque critique internationale par des accusations de complot ou d’atteinte à la souveraineté », observe El Bazzi. « Mais dans le monde financier, les réalités comptables pèsent plus que les discours nationalistes. »
Les Émirats rayés, un contraste saisissant
Dans un geste inverse, la Commission européenne a décidé de retirer les Émirats arabes unis de la liste noire, saluant des progrès substantiels en matière de traçabilité financière, de coopération internationale et de réformes législatives. Une évolution qui accentue le contraste avec l’Algérie, et montre que des efforts diplomatiques et structurels peuvent bel et bien inverser la tendance.
Ce contraste souligne également une dynamique régionale , alors que certains pays arabes choisissent la réforme et l’ouverture, d’autres, à l’image de l’Algérie, s’enfoncent dans un isolement croissant, minés par un appareil bureaucratique rigide et une élite accrochée à ses privilèges.
Et après ?
Cette inclusion dans la liste noire européenne n’est pas sans conséquences pour les citoyens algériens ordinaires, qui risquent de voir leurs transactions bancaires à l’étranger davantage contrôlées, ou leurs demandes de visas soumises à des vérifications supplémentaires. Elle pourrait également compromettre l’accès de l’Algérie à certains financements internationaux ou partenariats économiques.
Mais plus encore, cette décision est un signal politique clair , tant que le régime algérien ne s’engagera pas dans une réforme réelle de son système économique et judiciaire, il restera perçu comme une zone grise au sein du système financier mondial.
Encadré : Pays nouvellement ajoutés à la liste noire de l’UE (2025)
- Algérie
- Angola
- Côte d’Ivoire
- Kenya
- Laos
- Liban
- Monaco
- Namibie
- Népal
- Venezuela
Pays retirés de la liste noire :
- Émirats arabes unis
- Jamaïque
- Panama
- Sénégal
- Ouganda
- Philippines
- Gibraltar
- Barbade