Passeports de carton et nationalité à la carte : l’Espagne ferme la porte aux chimères de la « RASD »

Intisar Azmizam

Il fallait bien qu’un jour, le bon sens juridique rattrape les élans lyriques de certains parlementaires espagnols. Voilà que le gouvernement de Pedro Sánchez décide, sans détour ni langue de bois, de rejeter toute reconnaissance des documents délivrés par la fantomatique “République sahraouie”, autrement dit, la fameuse “RASD” que seuls Alger et quelques îles égarées dans l’océan Pacifique mentionnent encore entre deux signatures diplomatiques en pointillés.

Exit donc les « passeports » en papier glacé de la pseudo-police sahraouie, les « cartes d’identité » tamponnées dans les camps de Tindouf et autres documents folkloriques que certains espéraient faire valoir comme preuve d’identité pour demander la nationalité espagnole. Madrid a tranché , la fiction ne fait pas foi devant la loi.

Quand “Sumar” rime avec brouillard juridique

Le projet était aussi audacieux que juridiquement absurde. Le groupe parlementaire “Sumar”, visiblement nostalgique des républiques soviétiques perdues, a tenté de faire adopter une proposition autorisant certains habitants des camps de Tindouf à solliciter la nationalité espagnole sur la base de documents émis par le front Polisario.

Problème , le Polisario n’est pas un État, ses documents n’ont aucune reconnaissance légale, et les règles de nationalité en Espagne ne sont pas dictées par la poésie militante.

Fort heureusement, le Parti socialiste, encore attaché à un minimum de gravité républicaine, a nettoyé l’article problématique en commission de justice, précisant qu’aucune pièce issue d’une entité non reconnue internationalement ne saurait servir de fondement légal pour une demande de citoyenneté.

Des papiers sans valeur, une identité sans État

Le message est limpide , on ne devient pas Espagnol avec une carte en carton estampillée “RASD”. La diplomatie ibérique rejoint enfin la cohérence géopolitique. L’Espagne, faut-il le rappeler, a déjà reconnu dans une lettre officielle adressée au Roi Mohammed VI que le plan marocain d’autonomie est “le plus sérieux, crédible et réaliste” pour résoudre le conflit du Sahara.

Depuis ce tournant, Madrid semble décidée à transformer ses paroles en actes législatifs, tirant le rideau sur les ambiguïtés historiques et les postures hésitantes. Aujourd’hui, elle passe à l’étape supérieure , retirer toute base légale à la comédie documentaire que tente d’imposer le Polisario en Europe.

Identité bricolée et nationalité suspendue

Ce rejet des “papiers” sahraouis n’est pas une simple posture administrative , il soulève une question humaine fondamentale. Que faire de ces milliers de personnes enfermées dans les camps de Tindouf, privées d’avenir, de papiers reconnus et désormais même de l’illusion d’une “citoyenneté alternative” ?

Loin des tribunes militantes, l’Espagne pose une question brutale mais nécessaire , est-il moralement défendable de continuer à jouer avec la misère des réfugiés pour faire survivre une cause diplomatiquement moribonde ?

Le Maroc, discrètement gagnant

Face à cette énième tentative de détournement juridique, le Maroc n’a même pas eu besoin de hausser le ton. Sa stratégie, fondée sur la patience diplomatique, les alliances pragmatiques et la crédibilité institutionnelle, porte ses fruits. Ce n’est plus seulement à Washington ou Berlin que l’on prend acte de la légitimité marocaine sur le Sahara , c’est désormais dans les couloirs des parlements européens que cette reconnaissance prend une forme concrète.

Le royaume a su transformer une bataille territoriale en combat juridique maîtrisé, gagnant non par le verbe, mais par l’acte législatif. Une méthode qui semble dérouter le front Polisario, toujours accroché à ses slogans d’un autre siècle.

Le Polisario, isolé et embarrassé

Ce camouflet espagnol laisse le Polisario dans une posture de plus en plus intenable , isolé politiquement, désavoué juridiquement, et désormais embarrassé même sur le plan humanitaire. Car à force de faire croire à une “citoyenneté sahraouie”, la direction du front a piégé des milliers de personnes dans un no man’s land identitaire.

Leur situation est celle d’apatrides officieux, baladés entre des papiers sans reconnaissance et des promesses sans lendemain. Et maintenant que l’Espagne ferme la porte, il devient clair que la carte de la “documentation alternative” était un mirage dangereux.

 la souveraineté ne s’imprime pas à la maison

Ce que rappelle sobrement mais fermement Madrid, c’est un principe fondamental , la souveraineté ne se décrète pas dans un camp, elle se reconnaît dans les capitales. Et un passeport, pour être valide, doit émaner d’un État reconnu, pas d’une cause politique embouteillée dans le temps.

Le message est simple , la nationalité ne se gagne pas au nom de la nostalgie coloniale ou du militantisme romantique, mais dans le respect du droit international.

À ceux qui rêvaient d’un passeport sahraoui ouvrant la voie vers l’Europe, l’Espagne répond ,  la porte est fermée, les papiers sont invalides, et l’Histoire avance sans les illusions.

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