Quand les rêves d’amour cèdent la place aux procédures judiciaires
C’est un petit secret de famille que tout le monde connaît mais que personne n’ose trop commenter à voix haute , les mariages marocains importés en Belgique se terminent souvent plus vite qu’un colis Amazon Prime. L’amour, semble-t-il, n’a pas résisté à l’air libre des libertés européennes, ni au choc frontal entre traditions héritées et indépendance acquise.
Statistiques à l’appui, l’amour est en chute libre
Selon les données des tribunaux belges et les services consulaires marocains, près d’un mariage sur deux contracté entre membres de la diaspora marocaine finit en divorce dans les cinq premières années. La région de Bruxelles-Capitale arrive en tête du palmarès, suivie de près par Anvers et Liège. À ce rythme, les avocats spécialisés dans le divorce vont bientôt devoir engager des standardistes.
Mais que s’est-il donc passé ? L’amour est-il allergique au climat belge ? Le couscous ne réchauffe-t-il plus les cœurs ? Ou est-ce tout simplement que certains mariages n’avaient d’autre vocation que celle du « plan papier » ?
Quand l’amour épouse le code des étrangers
La cause n°1, à en croire les témoignages recueillis dans les milieux associatifs, reste le « mariage de convenance » — euphémisme poli pour désigner une union motivée davantage par le visa que par Cupidon. Une fois les papiers obtenus, et la carte de séjour glissée dans le portefeuille, la passion s’évapore, et avec elle le sens du devoir conjugal. L’un reste, l’autre part. Parfois, c’est même les deux qui se disputent le frigo et le canapé.
Mais le divorce ne frappe pas uniquement les mariages d’intérêt. Il est aussi l’enfant illégitime de la modernité. Car dans les rues d’Anderlecht ou de Molenbeek, ce ne sont pas les mêmes règles qu’à Ouarzazate ou à El Jadida.
Quand Madame devient indépendante… et que Monsieur perd le contrôle
L’émancipation de la femme est une avancée formidable… sauf pour certains maris qui ont quitté le Maroc avec l’idée d’importer leur autorité dans les valises. Mauvaise surprise , en Belgique, Madame travaille, conduit, vote… et surtout, décide. Pas question de lui confisquer ses papiers ni de lui imposer le menu du soir. Et comme elle gagne parfois plus que Monsieur — surtout s’il est encore en formation de « réinsertion » depuis huit ans — l’équilibre familial penche du côté du pouvoir féminin.
Résultat : les disputes explosent. Au cœur des conflits , la jalousie, la répartition des tâches, les sorties sans autorisation, et bien sûr… l’argent.
Les enfants, grands perdants du grand déballage
Au milieu de ces tempêtes conjugales, ce sont les enfants qui encaissent les vagues. Ballottés entre deux foyers, souvent pris en otage dans les conflits, ils grandissent dans des atmosphères tendues où le mot « famille » ne rime plus avec harmonie. Certains deviennent les traducteurs officiels des procès-verbaux de divorce, d’autres les arbitres des rancunes parentales.
Plus grave encore : beaucoup se retrouvent face à une double fracture — affective et culturelle. D’un côté, un père en peine d’autorité, souvent absent. De l’autre, une mère surchargée, tiraillée entre son travail et son nouveau rôle de cheffe de clan. Résultat , perte de repères, isolement, et parfois basculement vers des comportements à risque.
Et demain ? Vers un mariage postmoderne ?
Faut-il alors renoncer à l’amour ? Bien sûr que non. Mais il serait peut-être temps d’introduire, en plus des certificats de mariage, une petite formation préalable , « Vivre en couple à l’heure européenne », avec modules optionnels sur la gestion des conflits, les droits des femmes, et les joies de la lessive partagée.
Et surtout, rappelons à certains que le mariage n’est pas une agence de régularisation déguisée, ni un placement financier à long terme. C’est un contrat moral, une aventure partagée… et parfois, une belle illusion.