La marine royale marocaine renforce sa flotte avec un patrouilleur de nouvelle génération fabriqué en Espagne

Youssef Lafrej

Un nouveau jalon stratégique a été franchi dans la coopération maroco-espagnole. Mardi, les chantiers navals de Navantia, à San Fernando, en Andalousie, ont procédé au lancement officiel d’un patrouilleur de haute mer de type Avante 1800, destiné à la Marine Royale Marocaine. Une première depuis près de quarante ans dans l’histoire des relations navales entre les deux pays.

Le bâtiment, identifié par le numéro 502, a été mis à l’eau lors d’une cérémonie traditionnelle en présence de hauts responsables marocains et espagnols. Il s’agit du premier navire de guerre marocain construit en Espagne depuis les années 1980, résultat d’un contrat signé en septembre 2022, financé à hauteur de 95 millions d’euros par la banque Santander, pour un coût total de 130 millions d’euros.

Une plateforme moderne pour des missions complexes

D’une longueur de 87 mètres et d’une largeur de 13 mètres, le navire peut accueillir jusqu’à 60 membres d’équipage. Conçu pour répondre aux défis contemporains de la sécurité maritime, il sera principalement déployé pour la surveillance des côtes, la lutte contre l’immigration irrégulière, le trafic illicite et la sécurisation des frontières maritimes, notamment dans la zone stratégique du détroit de Gibraltar.

Inspirée du modèle vénézuélien vendu dans les années 2010, cette version marocaine bénéficie de technologies de nouvelle génération, intégrant des systèmes radar furtifs, une autonomie logistique accrue et des capacités de guerre électronique passive. L’armement principal inclut un canon automatique de 76 mm, des missiles antinavires, ainsi que des systèmes de défense aérienne à courte et moyenne portée.

Une coopération bilatérale au cœur des enjeux régionaux

Le capitaine Mohammed El Fadili, représentant de la Marine Royale lors de l’événement, a salué le projet comme une illustration forte des liens de coopération et d’amitié entre Rabat et Madrid, tout en soulignant son importance dans la stratégie de modernisation globale des Forces Armées Royales, décidée par Sa Majesté le Roi Mohammed VI.

Du côté espagnol, Ricardo Domínguez, président de Navantia, a présenté ce lancement comme “un symbole du savoir-faire industriel espagnol, mais surtout de la confiance croissante entre deux pays riverains d’un même espace stratégique”.

Dans un contexte régional marqué par des tensions sécuritaires persistantes au Maghreb et dans la région sahélienne, cette acquisition s’inscrit dans une vision marocaine affirmée de renforcement de la souveraineté navale et de positionnement en tant qu’acteur maritime clé en Méditerranée occidentale.

Une ambition navale africaine de plus en plus visible

Le patrouilleur vient enrichir une flotte déjà modernisée, aux côtés de la frégate polyvalente “Tarik Ibn Ziyad” et de la frégate “Mohammed VI”, témoins d’un effort constant du Maroc pour disposer de moyens navals de dernière génération, interopérables avec les forces alliées et adaptés aux nouvelles menaces asymétriques.

Hicham Motadad, expert en relations stratégiques, a rappelé que cette dynamique s’inscrit dans une coopération sécuritaire bilatérale croissante, qui pourrait prochainement s’étendre à d’autres domaines : drones, défense aérienne, surveillance satellitaire.

Un appui européen complémentaire

À noter que selon plusieurs sources espagnoles, le Maroc a également bénéficié en décembre dernier d’un appui financier de 2,5 millions d’euros via la Fondation ibéro-américaine pour la coopération publique internationale, présidée par le ministre espagnol des Affaires étrangères José Manuel Albares. Cette aide visait à renforcer les capacités de surveillance frontalière marocaine, notamment en matière de contrôle des flux migratoires, d’équipement logistique et de lutte contre les trafics humains.

En lançant ce nouveau bâtiment de guerre, le Maroc affirme non seulement sa capacité à moderniser ses moyens de défense, mais aussi sa volonté d’ancrer durablement sa stratégie de sécurité dans une logique de coopération euro-méditerranéenne — un modèle de partenariat sécuritaire Sud-Nord qui gagne en crédibilité.

 

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