Il fallait une plaque. Pas une manif, pas une bombe, pas un discours haineux ou une agression. Non, juste une plaque. Quatre chiffres et trois lettres pour réveiller tout un appareil d’État. “7 OKTOBR” — et voilà Bruxelles transformée en théâtre d’alerte politico-médiatique. Le président du MR, Georges-Louis Bouchez, n’a pas attendu le contrôle technique pour klaxonner son indignation : “Le mécanisme de contrôle ne fonctionne pas”, a-t-il martelé, comme s’il découvrait que l’administration belge est… belge.
Car oui, pendant que cette plaque d’immatriculation arpentait tranquillement les rues de la capitale, ni la misère sociale, ni les discours extrémistes, ni les vrais relais de haine sur les réseaux sociaux ne semblaient émouvoir grand monde. Mais cette plaque — muette, fixe, métallique — a réussi l’exploit : faire trembler la République.
Le SPF Mobilité, visiblement pris de court, s’est réfugié derrière la sainte bureaucratie : “Nous ne pouvons pas confirmer si la plaque a été délivrée par nos services.” Peut-être qu’elle commémorait un anniversaire, une communion, ou la première raclette entre amis. Après tout, on est en démocratie — libre de rouler, libre d’interpréter.
Mais alors, demandons-nous : que dit réellement cette plaque ? Rien. Pas un mot. Pas une revendication. Pas un tract sur le pare-brise. Rien qu’une date. Et c’est là que réside l’absurde : une société capable de reconnaître une référence indirecte au terrorisme… mais incapable d’agir sur ceux qui le justifient publiquement dans des vidéos, des posts, ou des discours bien articulés.
Pendant ce temps, certains propagent en toute impunité des thèses antisémites, d’autres s’expriment sans filtre contre la démocratie, et les réseaux sociaux débordent d’idéologies franchement toxiques — sans qu’un président de parti ne s’étrangle à chaque notification.
L’ironie ? On parle ici d’un pays où obtenir une plaque personnalisée prend deux semaines de paperasse, mais où faire l’apologie du Hamas en ligne prend deux minutes et n’entraîne aucune conséquence. Le mécanisme de contrôle ne fonctionne pas ? Non, Monsieur Bouchez, il fonctionne très bien… pour les plaques.
Finalement, tout cela rappelle cette règle non écrite de la politique spectacle : il vaut mieux une polémique facile qu’un problème compliqué. Une plaque, ça ne répond pas. Ça ne vote pas. Et surtout, ça permet d’exister médiatiquement, entre deux sondages en baisse.
Allez, prochaine étape : interdire les tatouages mal interprétés, les anniversaires mal tombés, ou les numéros de téléphone trop “connotés”. Car dans ce pays, tout passe. Sauf une plaque.