Voile, neutralité et grand écart politique : l’école selon Glatigny
Par notre envoyé spécial au pays de la laïcité à géométrie variable
La rentrée 2026 promet d’être haute en symboles – ou plutôt en leur interdiction. La ministre de l’Enseignement en Fédération Wallonie-Bruxelles, Valérie Glatigny (MR), a décidé de prendre le taureau par les cornes, ou plutôt le foulard par les épingles : elle déposera en juin un projet d’interdiction des signes convictionnels pour les enseignants du réseau officiel. Neutralité oblige, dit-elle. C’est que dans la Belgique de 2025, rien ne fait plus consensus que les débats sans fin sur ce que chacun a (ou non) le droit de porter sur la tête.
À l’origine du tollé, une proposition de la Team Fouad Ahidar, qui, dans un élan de pragmatisme radical, a suggéré d’autoriser ces fameux signes dans certaines écoles communales, évoquant – horreur ! – la réalité : discrimination des enseignantes musulmanes et pénurie d’enseignants. Deux faits socialement avérés, mais manifestement moins prioritaires qu’un bon rappel à l’ordre vestimentaire.
Madame Glatigny, elle, voit dans cette initiative un dangereux précédent, un coup de canif dans le contrat sacré de la neutralité. Car enfin, comment enseigner Victor Hugo ou Pythagore si l’on arbore un tissu sur la tête ? L’universalité de la pensée passe, visiblement, par un dress code très précis.
Mais attention, nuance importante : cette interdiction ne concernerait que le réseau officiel. Dans le réseau libre, chacun fera comme bon lui semble. L’enseignement catholique pourra donc continuer, en toute liberté et sérénité, à fonctionner avec ses propres références… confessionnelles. La neutralité, oui, mais à deux vitesses.
La ministre s’exprimait depuis une « mise au vert » éducative – un séminaire champêtre entre experts, pendant que les syndicats, eux, restaient à l’ombre. CGSP, SETCa-SEL, CSC : tout le monde a boycotté. En cause ? Des réformes jugées « nocives » et une vision « inégalitaire » de l’école portée par le MR. Mais qu’importe : pendant que le monde enseignant crie à l’injustice, le gouvernement, lui, repeint les murs de la neutralité en blanc bien éclatant. Sans tâche, sans nuance, sans débat.
En résumé, à défaut de régler la pénurie de profs, le gouvernement s’assure qu’ils soient bien coiffés. C’est déjà ça.