Quand Georges Louis Bouchez joue les diplomates dans un dossier explosif.
Une visite sous haute tension politique
Trois jours au Maroc. C’est le temps qu’il aura fallu à Georges Louis Bouchez, président du MR, pour provoquer un débat brûlant sur les intentions réelles de la Belgique dans le dossier du Sahara occidental. Officiellement, il s’agissait d’un voyage de travail avec des rencontres d’entrepreneurs et de responsables politiques. Mais c’est bien l’annonce d’un dépôt de texte visant à reconnaître la souveraineté du Maroc sur le Sahara qui a mis le feu aux poudres.
Une mémoire sélective ou une stratégie de façade ?
Il n’est pas inutile de rappeler que Georges-Louis Bouchez, aujourd’hui prompt à vanter « la présence dynamique d’une communauté marocaine bien intégrée », tenait encore récemment des propos bien moins conciliants. Il évoquait alors avec insistance le cas d’allocataires sociaux belges « qui possèdent des maisons au Maroc », insinuant une forme de fraude ou de double jeu. Cette dualité dans le discours pose question s’agit-il d’une réelle évolution de pensée ou d’un opportunisme circonstanciel, soigneusement calibré pour plaire à l’auditoire du moment ?
Beaucoup de pays et des puissances comme les États-Unis, l’Espagne, les Émirats arabes unis ou encore Israël ont reconnu la marocanité du Sahara sans exiger quoi que ce soit en retour. Pourquoi la Belgique, elle, semble t-elle mêler reconnaissance territoriale et coopération sécuritaire ?
Reconnaissance contre informations ?
Une suspicion légitime
Dans sa déclaration, Bouchez évoque des enjeux communs la sécurité, la lutte contre le terrorisme, les trafics et une meilleure coopération judiciaire. Mais en creux, une impression dérangeante s’installe la reconnaissance de la souveraineté marocaine est-elle conditionnée à un accès renforcé à des bases de données sécuritaires, à des accords de rapatriement ou à d’autres concessions ?
Le Maroc a refusé un projet d’accord de partage d’informations avec la Belgique, jugé déséquilibré par son Parlement. Bouchez arrive donc avec un autre discours, presque marchand « on vous reconnaît, mais en échange, vous coopérez ». Est-ce encore de la diplomatie, ou commence-t-on à parler de chantage géopolitique déguisé ?
Une déclaration électoraliste sous fond de confusion institutionnelle.
À l’heure où la région bruxelloise entre dans une phase de recomposition politique, avec des enjeux communautaires, sociaux et migratoires toujours plus complexes, une question devient centrale qui représente réellement la Belgique dans ce type de dossier ? Le ministre des Affaires étrangères ? Le Premier ministre ? Le Parlement fédéral ? Ou bien un président de parti, en mal de visibilité, qui improvise une politique étrangère sur Instagram ?
Georges Louis Bouchez, jamais à court de posture, s’exprime comme s’il dirigeait un État. Pourtant, aucun mandat gouvernemental, aucune consultation des autres partis de la majorité. Une visite en solo, une proposition en solitaire, mais des conséquences potentiellement lourdes.
Une ironie solaire et footballistique
Dans son discours, Bouchez a vanté le potentiel énergétique du Maroc soleil, vent, hydrogène vert… Le tout dit avec l’assurance d’un ministre de l’Énergie — qu’il n’est pas. Il évoque même la Coupe du Monde 2030, comme si l’avenir énergétique de l’Europe dépendait du MR, et le sort de la FIFA, de son tweet.
Mais à ce stade, on s’interroge le président libéral a-t-il aussi un projet d’investissement solaire dans le Sahara ? Un centre d’entraînement pour Diables rouges à Dakhla ? Ou simplement une envie de briller dans un désert diplomatique ?
Le Maroc, partenaire ou cible d’un troc politique ?
Le Royaume du Maroc, fort de soutiens internationaux croissants à son plan d’autonomie, n’a pas besoin d’un chèque en blanc assorti de clauses implicites. De nombreux pays ont reconnu sa souveraineté sans rien exiger, ni insinuer de contreparties. La Belgique, au lieu de jouer les équilibristes, aurait pu adopter la même voie celle du respect, de la clarté et d’une coopération égalitaire.
Mais à la place, Bouchez semble vouloir négocier une reconnaissance comme on échange des faveurs entre notables, mêlant intérêts sécuritaires, enjeux électoraux, et volonté de reconquête médiatique.
Entre posture et imposture
Reconnaître la marocanité du Sahara peut être un choix stratégique, clair et assumé. Mais dans ce cas précis, la démarche de Georges Louis Bouchez brouille le message. Elle apparaît isolée, confuse, électoraliste, et surtout illégitime tant qu’elle n’est pas portée par les institutions belges compétentes.
Quant au Maroc, une autre question s’impose cèdera t-il à cette tentative de marchandage ?
Ou exigera t-il, comme il l’a déjà fait, une diplomatie digne et mutuellement respectueuse ?