Comité autoproclamé : quand l’ambition voyage sans visa démocratique

Hanan El Fatihi

Il était une fois, dans un hôtel chic de Rabat, un groupe de personnes animées par une passion débordante pour… les titres ronflants, les communiqués pompeux et, surtout, les fauteuils encore vacants. Réunis sous la bannière d’un soi-disant “Comité de dialogue sur le chantier royal relatif à la diaspora marocaine”, ces dames et messieurs ont décidé, sans passer par la case élection ni la moindre légitimation, qu’ils représentaient désormais les Marocains du monde.

Le communiqué, soigneusement rédigé dans un style mi-administratif, mi-prophétique, nous apprend que la réunion s’est tenue dans une salle feutrée de l’hôtel Executive à Agdal, un choix de lieu à la hauteur de l’ambition affichée. Ali Zoubir, présenté comme le bienfaiteur providentiel — financier du projet et visiblement de bien d’autres choses —, a ouvert la séance en évoquant le discours royal du 6 novembre comme s’il s’agissait d’un mandat officiel tombé du ciel sur sa personne et ses amis.

Il est difficile de ne pas remarquer l’ironie : des individus inconnus de la majorité des MRE (Marocains Résidant à l’Étranger) s’arrogent le droit de parler en leur nom, au nom de “l’unité nationale” et des “valeurs du vivre-ensemble”, tout en s’inventant une légitimité sortie tout droit d’une réunion d’hôtel. Si ce n’était pas si sérieux, ce serait une excellente pièce de théâtre politique.

Le casting est soigné : anciennes et actuelles parlementaires, “journaliste du Canada” (c’est dire), “investisseuse de Belgique”, “professeur d’université et membre du CESE”, sans oublier quelques “experts” autoproclamés. Tous réunis pour dresser un état des lieux des “acquis” et “échecs” des institutions officielles, tout en s’improvisant alternative crédible. Un coup de maître dans l’art du recyclage de notabilités en quête de lumière.

Mais le clou du spectacle reste cette volonté affichée de “proposer des recommandations concrètes” au nom des MRE… sans jamais avoir consulté un seul MRE. Peut-être suffira-t-il d’un bon logo, d’un site internet, et d’un communiqué de presse envoyé aux bonnes rédactions pour transformer une initiative privée en mission nationale. La méthode est connue : on s’auto-désigne, on s’auto-congratule, et surtout, on se prépare à s’auto-positionner pour de futures nominations.

À ce rythme, il ne manque plus qu’un drapeau, un hymne et une boîte mail officielle pour que la “Commission Zoubir & Co” devienne une institution parallèle. Une République autonome des ambitions perdues, où le financement vaut investiture, et où le silence de la vraie diaspora vaut aval.

La communauté marocaine à l’étranger mérite mieux que des conférences de salon et des initiatives fantômes. Elle mérite des représentants choisis par elle, pour elle, et non des apparitions opportunistes en quête de reconnaissance.

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