Molenbeek, des hooligans sèment la terreur, un commerce saccagé, une famille brisée
Yamina Lamin
Témoignage de la sœur
“C’était un samedi de folie. Ils sont arrivés comme une meute. Mon frère et mon neveu ont essayé de protéger la boutique… Ils ont été roués de coups. Mon frère est à l’hôpital, il saigne de partout. Et pour quoi ? Pour avoir voulu protéger ses clientes. C’est inhumain.”
Le témoignage est glaçant. À Molenbeek, la finale de la Coupe de Belgique a viré au cauchemar pour la famille Ben, propriétaire d’un petit commerce de carrelage situé rue de Ribaucourt. Ce samedi, une centaine de hooligans, vêtus de noir, visages masqués, armés de matraques et de battes, ont envahi les rues du quartier populaire. Leur cible ? Tout ce qui se trouvait sur leur passage. Passants, voitures… et ce petit Brico tenu par une famille d’origine marocaine depuis près de vingt ans.
Une violence préméditée
Selon plusieurs riverains, les individus – identifiés comme des supporters du Club de Bruges en route vers la finale – ne cherchaient pas le foot, mais l’affrontement. “Ils criaient, ils frappaient, ils insultaient tout le monde, surtout les femmes. Mon beau-frère s’est interposé quand l’un d’eux a tenté de jeter une étagère sur une cliente”, poursuit la sœur du gérant, encore sous le choc.
Les dégâts dans le magasin sont considérables. Vitres brisées, rayons renversés, stocks détruits. Le gérant, grièvement blessé, a été transporté d’urgence à l’hôpital. Son fils, le neveu, a le bras fracturé. “Il a seulement 17 ans. Il travaillait pendant ses vacances. Maintenant, il a peur de sortir”, souffle la tante, les larmes aux yeux.
Pourquoi ce silence ?
À ce jour, seules quelques figures politiques locales comme Ahmed Laaouej , Ridouane Chahid et Jamal Ikazban , Ahmed Laouej ont dénoncé publiquement l’attaque. Mais dans les grands médias et du côté des partis traditionnels, le silence est assourdissant. Pourquoi ? Parce que les victimes sont issues des quartiers populaires ? Parce que ce sont des familles arabes, marocaines ?
“On inverse les rôles. Quand il y a une bagarre à Molenbeek, on en parle pendant des semaines. Ici, ce sont des supporters flamands violents, et tout le monde détourne le regard”, déplore un habitant du quartier.
Des habitants livrés à eux-mêmes
La scène s’est déroulée en plein jour, à quelques rues de stations de métro fréquentées. Et pourtant, les renforts policiers sont arrivés tard. Trop tard. “C’est comme si notre sécurité valait moins. On paie nos impôts, on tient nos commerces à bout de bras, et voilà comment on nous traite”, s’indigne un voisin venu aider à nettoyer le magasin dimanche matin.
Appel à la justice
La famille Ben demande des comptes. Elle demande aussi une enquête sérieuse et des arrestations. Car les images de caméras de surveillance existent. Les visages, même masqués, peuvent être identifiés. Et surtout, elle demande que la violence contre les habitants des quartiers populaires ne soit plus minimisée.
“Ce n’est pas juste un fait divers. C’est une attaque ciblée contre des gens qui n’ont rien demandé. On veut que ça cesse. Et on veut que justice soit faite.”