Expulsions massives des sans-papiers marocains : une convention entre le Maroc et la Belgique fait débat
Bouchaib El Bazi
La Belgique intensifie ses efforts pour expulser les sans-papiers marocains présents sur son territoire, en vertu d’une convention récemment signée avec le Maroc. Cet accord vise à accélérer les procédures de retour forcé, notamment pour les personnes jugées comme une menace pour la sécurité publique. Cependant, cette mesure soulève de nombreuses interrogations quant à son impact humain, juridique et social.
Des centres de rétention saturés par des Marocains sans papiers
Les centres de rétention administrative en Belgique comptent un grand nombre de ressortissants marocains en situation irrégulière. Ces établissements, souvent décrits comme surpeuplés, accueillent des personnes en attente de leur expulsion. Malgré leur importance dans le dispositif, ces centres échappent presque totalement à la surveillance des parlementaires belges, ce qui alimente les critiques sur un manque de transparence et de respect des droits humains.
Les sans-papiers concernés, y compris ceux ayant travaillé en Belgique, se retrouvent souvent dans des situations déchirantes. Beaucoup sont contraints de quitter le pays de manière forcée, parfois même sous la contrainte physique, laissant derrière eux leurs biens, leurs économies, et parfois leurs familles.
La mise en œuvre de l’accord repose en grande partie sur des vols organisés avec la compagnie Royal Air Maroc, qui accepte de transporter ces passagers dans des conditions sécuritaires complexes. Toutefois, cette coopération expose la compagnie à des critiques, certains évoquant les risques liés à ces opérations, aussi bien pour les équipages que pour les autres passagers.
Une fois de retour au Maroc, les expulsés se retrouvent dans une situation précaire. L’État marocain ne semble pas disposer d’un plan clair de réintégration pour ces personnes, qui font face à des défis majeurs pour reconstruire leur vie. Dépourvus de ressources ou d’assistance, beaucoup peinent à retrouver une stabilité économique et sociale.
Cette absence de soutien aggrave leur sentiment d’abandon, d’autant plus qu’ils ont souvent travaillé de manière informelle en Belgique, contribuant à l’économie locale sans pouvoir rapatrier leurs avoirs ou en bénéficier eux-mêmes.
Le recours à la force dans les expulsions soulève des questions sur le respect des droits humains, d’autant plus que de nombreuses organisations dénoncent des procédures souvent expéditives et un manque de recours effectifs pour les sans-papiers. L’absence de visites parlementaires dans les centres de rétention renforce les accusations d’opacité et de traitements inhumains.
En parallèle, la Belgique justifie ces mesures en invoquant des préoccupations liées à la sécurité nationale, en particulier pour certains sans-papiers jugés menaçants. Cependant, cette logique punitive est critiquée pour son manque de discernement envers les cas individuels et ses conséquences humaines dramatiques.
Cette situation illustre les défis complexes de la gestion des migrations entre le Maroc et la Belgique. Si la coopération bilatérale vise à renforcer le contrôle migratoire, elle ne peut ignorer les répercussions sociales et humaines des expulsions massives.
Pour qu’un tel partenariat soit véritablement efficace et équitable, il serait nécessaire de mettre en place des mécanismes de réintégration pour les expulsés au Maroc, ainsi qu’un cadre plus transparent et respectueux des droits humains en Belgique. À défaut, cette politique risque d’accentuer la détresse des sans-papiers tout en alimentant les tensions entre les deux pays.