Vives inquiétudes sur le sort du journaliste algérien Hichem Aboud, porté disparu depuis quatre jours

C’est l’inquiétude totale au sein de la famille et des proches de Hichem Aboud, qui craignent désormais le pire pour ce virulent opposant à la junte algérienne au pouvoir. Depuis quatre jours, tous ses téléphones sont mystérieusement éteints et il n’a donné aucun signe de vie. A-t-il été enlevé ou même assassiné par les services de renseignement algériens, qui le traquent et le menacent de mort depuis plusieurs années?

La quasi-totalité des opposants et des journalistes politiques algériens exilés à travers le monde, dont la plupart sont très actifs sur les réseaux sociaux – à l’instar d’Amir Boukhors, alias Amir DZ, Anouar Malek, Abdou Semmar, entre autres – ont été, ces dernières années, la cible de tentatives d’assassinat ou d’enlèvement orchestrées par le régime d’Alger. Hichem Aboud, 69 ans, exilé en France depuis 1997, n’est pas en reste. Dans une vidéo postée le jour même de sa disparition, il annonçait être à nouveau visé par des tentatives d’assassinat de la part des services de renseignement algériens.

Interrogé par Medi 1 TV samedi soir, l’avocat de Hicham Aboud, Dalil Essakali Moulay Abdeljalil, a déclaré depuis la ville française de Lille que son client l’avait contacté jeudi matin, le 17 octobre, pour l’informer de son intention de prendre l’avion le jour même afin de se rendre de Paris à Barcelone.

Maître Dalil Essakali Moulay Abdeljalil exprime une grande inquiétude, affirmant que ce qui est arrivé à Hichem Aboud relève davantage d’un enlèvement que d’une simple disparition. Il accuse ceux qui, ces dernières années, ont tenté d’enlever ou d’assassiner Aboud d’être derrière ce kidnapping. Bien que le général Khaled Nezzar, qui considérait Hichem Aboud comme son principal ennemi, ne soit plus de ce monde après avoir tout tenté pour le réduire au silence, son fils Lotfi Nezzar continue de diriger un média de propagande soutenant les acteurs de la décennie noire. Auteur du livre à succès «La maffia des généraux», Hichem Aboud reste une cible privilégiée de ce clan.

Coïncidence troublante, c’est le jour même de la diffusion de sa dernière vidéo sur le sujet, qu’Hichem Aboud a cessé de donner signe de vie. Dans cette vidéo, il dénonçait les tentatives d’assassinat dont il est toujours la cible, cette fois de la part de Mouloud M’Henna, fils du général-major Djebbar M’Henna, récemment limogé de la direction des renseignements extérieurs, qu’il dirigeait depuis 2022. Hichem Aboud avait accusé Mouloud M’Henna d’être impliqué dans un vaste trafic de cocaïne, ce qui aurait précipité la chute de son père.

Ce qui demeure incertain, c’est de savoir si Hichem Aboud a été enlevé lors de son départ de l’aéroport de Paris ou s’il a effectivement quitté la France pour disparaître à son arrivée en Espagne, où il n’a contacté personne pour confirmer son arrivée à destination.

Toutes les hypothèses sur la disparition de Hichem Aboud convergent vers une même piste: celle d’un enlèvement ou d’un traquenard tendu par les services algériens. Une vague de solidarité, mais aussi de vive inquiétude, entoure cette mystérieuse disparition de l’opposant algérien, à tel point que même ses adversaires politiques au sein de l’opposition, comme le journaliste Abdou Semmar, lui ont exprimé leur soutien.

Hichem Aboud n’est pas un journaliste ou activiste algérien comme les autres. Ancien officier de l’armée algérienne, il a travaillé au sein du cabinet du général Mohamed Betchine, qui fut dans les années 80 le chef des renseignements militaires et des services de renseignement. Cette expérience lui confère une connaissance approfondie du fonctionnement interne du Système et de l’organisation de l’armée, ainsi qu’un accès privilégié à des sources de premier plan.

Hichem Aboud est devenu une figure emblématique du Hirak populaire algérien. Ses interventions quotidiennes, voire pluriquotidiennes, sur les réseaux sociaux, notamment via sa chaîne YouTube, sont toujours précédées d’un générique où des manifestants du Hirak lui expriment leur soutien à travers le slogan «Hichem Aboud sahafi Horr» (Hichem Aboud est un journaliste libre). Ce slogan dénonce non seulement l’acharnement de la junte algérienne, qui a multiplié les condamnations par contumace contre Hichem Aboud et émis des mandats d’arrêt internationaux sous le prétexte qu’il serait un «terroriste», mais fustige également la presse locale, complètement muselée par le régime après l’incarcération de nombreux journalistes et la fermeture de tous les médias critiques.

«L’Algérie est un pays dirigé par une bande de voyous» est l’un des leitmotivs de Hichem Aboud. Il est malheureusement à craindre que cet État voyou ait orchestré son enlèvement, voire pire, pour faire taire l’une des voix les plus sévères à l’égard de ses pratiques mafieuses.

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