Du point de vue sanitaire d’abord, certes la vague d’Omicron a été moins létale jusqu’à présent que les deux vagues précédentes, dont les pics ont été atteints avec respectivement le 20 novembre 2020, avec 92 décès et le 20 août 2021, avec 115 décès en une journée. Mais, depuis début janvier, le nombre de décès ne cesse d’augmenter, de même que les hospitalisations, et cela ne présage rien de bon pour la réouverture des frontières tant attendue pour le 7 février. Ajoutez à cela le fait que le nombre de cas positifs listés chaque jour ne correspond qu’aux tests effectués, et que compte tenu de la forte transmissibilité du variant Omicron, et ses symptômes s’apparentant pour la majorité des cas à une forte grippe, le nombre de cas réel est certainement bien plus élevé.
Pourtant, l’objectif premier de la fermeture des frontières était de permettre au Maroc de limiter le risque de propagation du nouveau variant dont on ne connaissait pas suffisamment l’impact potentiel. Il n’a fallu que quelques jours pour qu’en décembre le variant soit identifié au Maroc, rendant caduque le raisonnement protectionniste. D’ailleurs, les rares pays ayant eu le même réflexe que le Maroc, comme Israël, sont depuis revenus sur leur position et la tendance actuelle en Europe est en faveur de la levée des restrictions dans la majorité des pays malgré une flambée sans précédent du volume de cas positifs, en France notamment, avec en moyenne quelque 500 000 cas par jour
Comment expliquer et justifier dès lors, la prudence marocaine dans ce contexte nouveau ? Pourquoi nos frontières resteraient fermées sous prétexte que leur ouverture accentuerait l’impact du virus alors même que nos concitoyens se chargent malgré eux de propager le virus depuis des semaines ?
Les autorités politiques, du Chef du gouvernement au ministère de la Santé ou des Affaires étrangères, rassurent à demi-mots l’opinion publique, mais reconnaissent obéir à des contraintes et des décisions qui les dépassent. Mais cette même opinion publique fait preuve désormais d’une certaine désillusion et manifeste un ras-le-bol grandissant.
C’est économiquement que les Marocains sont le plus touchés par cette énième fermeture des frontières, qui pour beaucoup, n’est plus un acte de prudence comme lors de la première vague, mais plutôt un aveu d’impuissance et d’incapacité à gérer les risques inhérents à la circulation du virus au Maroc
Est-ce que les touristes avec les exigences de vaccination, les tests PCR et antigéniques au départ et à l’arrivée, présentent un risque de contamination plus élevé que ce n’est déjà le cas au Maroc ? D’ailleurs, les touristes ne sont pas gentiment en train d’attendre que le Maroc rouvre, ils sont déjà en Turquie, en Grèce ou en Espagne, des destinations qui se sont rapidement adaptées aux contraintes d’Omicron.
Marrakech pour ne citer qu’elle, est désormais une zone sinistrée. Et s’il est probable que les aides de 2 milliards débloquées par le ministère du Tourisme aideront les plus gros acteurs à éponger légèrement l’impact des restrictions, il est quasiment certain que les employés du secteur touristique, très souvent dans l’informel, continueront à dépérir jusqu’à un point de non-retour comme en témoignent la mobilisation et les manifestations récentes des syndicats du secteur.
Ce ne sont plus les discussions de salons et la frustration de ceux qui ne peuvent plus flâner à Marbella et boulevard Saint-germain qui posent problèmes (puisqu’ils ont d’ailleurs trouvé une alternative avec les jets privés), mais bien tout un pan de la population qui souffre et continuera durablement à subir les conséquences économiques de cette fermeture. Le coût social et politique en vaut-il la chandelle ? Le coût de la réouverture est-il plus élevé que la fermeture ? Réponse dans les prochains jours par voie de communiqué…