Algérie. Des magistrats refusent de superviser la présidentielle en soutien aux manifestants

Des magistrats, maillon important de l’organisation des scrutins en Algérie, ont annoncé ce samedi 13 avril qu’ils allaient boycotter la supervision de l’élection présidentielle du 4 juillet, en soutien au mouvement de contestation.

Plus d’une centaine de magistrats ont manifesté devant le ministère de la Justice à Alger ce samedi 13 avril, à l’appel du Club des magistrats, une organisation en cours de constitution qui se présente comme l’organe regroupant la majorité des juges en rupture de ban avec le Syndicat national des magistrats (SNM), proche du pouvoir.

« Le Club des magistrats a décidé de boycotter l’opération de supervision de l’élection présidentielle », a déclaré Saad Eddine Merzoug, juge d’instruction à la Cour d’El Oued (nord-est).

Les magistrats jouent un rôle majeur dans l’organisation des scrutins en Algérie car ils sont notamment chargés de superviser le fichier électoral, point de discorde récurrent entre l’opposition et le pouvoir.

Une révision exceptionnelle des listes électorales est prévue du 16 au 24 avril, dans la perspective du scrutin du 4 juillet avant l’organisation d’un scrutin présidentiel le 4 juillet, annoncée mercredi par le président par intérim Abdelkader Bensalah afin de trouver un successeur à Abdelaziz Bouteflika, qui a démissionné après avoir été lâché par l’armée à l’issue de plusieurs semaines de manifestations monstres.

La justice utilisée par le passé pour « imposer ses candidats par la fraude électorale »

Les manifestants ont proclamé leur attachement à l’« indépendance de la justice », malmenée depuis des années, selon eux, par un pouvoir dont la rue réclame le départ depuis le début des manifestations le 22 février.

« Chaque vendredi, le peuple réitère son rejet des propositions du pouvoir. Ces manifestations sont un référendum en faveur d’une transition pilotée par des personnalités consensuelles », a estimé Nourredine Benissad, un des ténors du barreau d’Alger et défenseur des droits de l’Homme.

« Il n’est pas aisé d’être magistrat en Algérie et de boycotter la supervision des élections », a souligné de son côté l’avocat et militant Mustapha Bouchachi. « Par le passé, le pouvoir a utilisé les magistrats comme alibi pour imposer ses candidats par la fraude électorale ».

Le fils de Bouteflika demande à l’armée d’accompagner la transition

Dans un communiqué transmis à la presse samedi, Ali Benflis, ancien Premier ministre d’Abdelaziz Bouteflika devenu l’un de ses principaux opposants, a appelé l’armée à accompagner la transition sans l’imposer.

« Il n’est pas attendu de nos forces armées qu’elles soient l’ordonnateur de la sortie de crise, mais qu’elles remplissent un devoir de facilitation, d’accompagnement, de garantie et de protection de la solution de la crise », estime-t-il.

Les contestataires prônent la mise sur pied d’institutions ad hoc, pour organiser une véritable transition post-Bouteflika. De son côté, le pouvoir, soutenu par le chef d’État-major, le général Ahmed Gaïd Salah, revenu au centre du jeu politique, s’appuie sur la Constitution pour s’en tenir à l’élection d’un nouveau président sous 90 jours.

Une délégation ministérielle en visite à Béchar, ville de garnison dans l’ouest de l’Algérie, zone habituellement peu mobilisée, a été accueillie par des manifestations, selon plusieurs médias algériens.

Lors de cette visite, l’une des premières sorties du nouveau gouvernement, des protestataires ont déployé de larges banderoles contre le gouvernement dont « ils ne reconnaissent pas la légitimé », a indiqué l’agence officielle APS

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