L’administration marocaine

Première partie

Préambule

Les bureaux et les bureaucrates composent la base de l’administration. La bureaucratie,  c’est l’influence excessive de l’administration sur la vie des gens. L’administration est partout et nulle part. Il ne fait pas bon la critiquer ; elle se venge toujours. Pour frapper, elle emploie la délation, les fiches, les dossiers, les rapports secrets…. Elle peut aussi se rendre coupable des pires forfaits (assassinat, viol, vol), sans qu’on ne puisse découvrir ses auteurs qui frappent impitoyablement à tort et à travers. C’est pour cela que le mot administration est pénible à prononcer.  

Si on examine les structures qui forment l’administration marocaine, on constatera que la vie humaine compte peu de chose dans l’esprit de ses bureaucrates. Entêtée et de mauvaise foi, l’administration marocaine ne répare pas ses ‘’gaffes’’ et ne reconnaît jamais ses torts. Elle ne tient pas ses promesses. Elle connaît l’art de faire patienter les gens en projetant toutes sortes de réformes qu’elle ne réalise pas. Chaque fois qu’une réforme n’aboutit pas, les politiciens de pacotille, qui ont tout promis, demandent à leurs solliciteurs de s’en prendre à l’administration. Ils rejettent la faute sur les bureaux et les subordonnés ou les subalternes qu’ils sacrifient à leurs intérêts.

De même, l’administration marocaine souffre de corruption endémique. A cheval entre les principes et les règlements, elle se laisse facilement corrompre. Elle pratique le chantage et n’a pas de temps pour s’occuper des citoyens. Par contre, elle trouve le temps de nuire, de bloquer, de ”saboter” en poussant les gens à aller dans les bureaux pour ne rien obtenir… Il y a toujours des formalités superflues à remplir qui prennent tout le temps et qui obligent les individus à des va-et-vient inutiles.

L’administration est un mécanisme, un système machiavélique. Elle met l’intérêt des gens en conflit en prenant soin de satisfaire les uns au détriment des autres. Elle compte sur la résignation et le découragement des individus n’ayant pas d’idées personnelles et se débarrasse de ceux qui la gênent en les envoyant au ”garage”. Sa grande préoccupation est de sauver la forme aux dépens du fond et des individus. Elle prononce des jugements équivoques, fait des réponses évasives. Il n’y a pas d’administration sans dossiers secrets, renseignements, espionnage. Un faux rapport vous suit toute la vie. Vous serez toute votre vie aux yeux de l’administration un incapable, un inutile, un perturbateur, un agitateur qui n’aura droit à aucun avancement. Vous ne pouvez jamais connaître votre dossier qui est faux, car il doit demeurer secret. L’intéressé ignore les fautes qui lui sont reprochées. Il est persécuté, condamné, exécuté, sans savoir pourquoi. Souvent, l’unique reproche qu’on lui fait, c’est d’être un esprit libre, une conscience d’élite rebelle.

Les administrations marocaines sont faites sur le même moule. Elles sortent de la même ”usine” du Makhzen : la routine et la résistance au changement. Dans l’administration marocaine, il faut des dispositions et du caractère pour se conserver intact. Comme en médiocratie, on juge de la valeur des gens d’après la position qu’ils occupent, leur situation, leur fonction, leurs relations. On ne tient aucun compte de leur valeur personnelle. On n’admettra jamais qu’un petit fonctionnaire ait un talent quelconque, cela irait contre l’ordre et l’autorité. Mais on en trouve aisément à ceux qui, à défaut de talent, ont eu celui de parvenir au sommet de la hiérarchie. Par la fonction qu’ils remplissent et le pouvoir qu’ils ont sur les hommes, ces parvenus et ces ”médiocres” de la bureaucratie cherchent à empêcher l’individu d’accomplir sa tâche avec joie.

En résumé, force est de constater que l’administration est démesurément pesante au Maroc. Elle le bloque et l’empêche de se moderniser et se développer. Avec ses bureaux lugubres qui sentent le moisi, l’administration marocaine est un labyrinthe hiérarchique où tout le monde a du mal à trouver la sortie. Elle est sacrée et son respect est le premier devoir que la hiérarchie impose au citoyen. L’employé qui n’a pas d’idées, qui est obséquieux, flagorneur, mouchard, et ayant le sens de la hiérarchie et de l’administration, n’aura pas d’histoires, bien au contraire, il sera bien noté. En effet, l’administration marocaine et sa bureaucratie comptent sur le manque d’initiatives, la résignation, l’obséquiosité, la docilité et le découragement des individus. Mais en dépit de tout cela,  il ne faut pas se décourager, il faut lutter jusqu’au bout contre l’excès bureaucratique.

Les Marocains qui ne font aucune remontrance à l’administration qui les écrase sous le poids de la médiocratie bureaucratique, vont-ils enfin comprendre que la paperasserie des formalités zélées qui leur prennent beaucoup de temps à remplir et qui les obligent à des va-et-vient, sont parfaitement inutiles ? Que cette dispersion de l’effort est un mal ? Que l’individu n’est pas fait pour accomplir des besognes contreproductives et stériles pour se créer des difficultés, mais qu’il est fait plutôt pour vivre la vie hors de la conception rigide, étroite, oppressive, des bureaucrates médiocres et corrompus ?

A suivre…

Saïd CHATAR

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