Les dirigeants européens veulent reprendre la main sur la nomination du président de la Commission

Au risque d’un clash avec le Parlement européen, les Vingt-sept ne veulent pas se faire voler cette prérogative. Ils ont également ouvert les hostilités sur le budget de l’Union.

Le remake de 2014 n’aura pas lieu. Les dirigeants européens ont décidé de reprendre la main sur le choix du futur président de la Commission européenne. Dans la stricte mesure des traités.

Lors des dernières élections au Parlement européen, en 2014, ils avaient été pris de court par les partis politiques représentés dans l’hémicycle. Ceux-ci avaient choisi très en amont des têtes de listes, les fameux « Spitzenkandidaten ». Une fois les élections passées, le parti conservateur PPE, arrivé en tête du scrutin avait réclamé le poste de président de la Commission européenne pour sa tête de liste, Jean-Claude Juncker.

A l’époque, la chancelière Angela Merkel avait moyennement apprécié. Cette fois donc, pas question de se lier les mains à l’avance. « Il ne s’agit pas de dessaisir le Parlement européen de son droit à élire le président de la Commission. Simplement le Conseil européen refuse de voir préempter des candidats alors que les élections se déroulent dans 15 mois. Il y aura un dialogue avec un Parlement européen renouvelé » assure un proche de l’Elysée.

« Il ne devrait pas y avoir d’automaticité » entre la nomination de ces chefs de file des partis et le choix du futur président de l’exécutif européen, a déclaré la chancelière Angela Merkel à l’issue du sommet, résumant la pensée générale autour de la table des dirigeants européens.

Cette prise de position attendue du Conseil européen convient à Emmanuel Macron puisqu’il n’a aujourd’hui aucune représentation politique à l’assemblée. Il préfère peser après le scrutin de Strasbourg, surtout s’il franchit avec succès l’épreuve des urnes.

Mais cette fin de non-recevoir risque de braquer le Parlement européen. Ce dernier a menacé, dans sa résolution du 7 février , de rejeter tout candidat qui n’aura pas été désigné comme Spitzenkandidat en amont des élections européennes. «Il faut bien distinguer le processus interne aux familles politiques européennes et la mission que les traités confèrent au Conseil européen », a plaidé Emmanuel Macron. Selon les textes, c’est aux dirigeants européens de proposer un candidat à la présidence de la Commission, que le Parlement approuve ensuite.

Les partenaires de la France ont également dit non à la suggestion d’Emmanuel Macron de réduire la taille de la Commission européenne pour la rendre plus efficace. Une preuve que les Etats restent attachés à l’architecture actuelle de l’exécutif européen au sein duquel chaque Etat membre dispose d’un commissaire.

Même déconvenue pour la proposition de Jean-Claude Juncker de fusionner les deux têtes de l’Europe actuelle, celui de la Commission européenne et celui du Conseil européen, incarné par le Polonais Donald Tusk. Pas de saut fédéral en perspective.

Les Vingt-sept ont toutefois marqué une ouverture en direction des listes transnationales. Si ce projet a été repoussé par une majorité de parlementaires européens début février pour les élections de 2019, Emmanuel Macron a plaidé pour en préserver l’idée à l’horizon 2024 : « ce travail pour une Europe démocratique demeure indispensable compte tenu de la baisse de la participation aux élections européennes depuis 1979 ».

Le chef de l’Etat s’est réjoui, par ailleurs, du fait que son projet de consultations citoyennes pour réveiller le débat européen ait été finalement approuvé par 26 Etats-membres. Seule la Hongrie de Viktor Orban restera en marge.

Décidément attachés au respect des règles et des valeurs européennes, les Vingt-sept ont aussi entamé les discussions préliminaires sur l’avenir du budget européen . Pour la première fois depuis le début de la construction européenne a été évoquée l’idée d’injecter des éléments de conditionnalité dans ce budget – un sujet loin de faire l’unanimité.

Pour la France notamment, il n’est plus question de distribuer les milliards d’euros de financements européens si en retour les Etats bénéficiaires bafouent les règles du jeu commun. « Le budget est un instrument de solidarité. Je refuserai qu’il finance de la divergence fiscale, sociale, ou concernant les valeurs », a prévenu Emmanuel Macron.

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