Jacques Brel n’aime pas les élus Belgo marocains.

Albert Waed

Non monsieur, ces gens-là n’aiment pas leurs électeurs d’origine marocaine! Ou peut-être ils les ont aimés un tout petit peu… le temps de glisser un bulletin de vote lors des élections pour les communes ou le parlement de Bruxelles.

D’abord…
D’abord, y’a l’aîné
Lui qu’est comme un melon
Lui qui a un gros nez
Lui qui sait plus son nom, Monsieur, tellement qu’il boit
Ou tellement qu’il a bu
Qui fait rien d’ses dix doigts
Mais lui qui n’en peut plus
Lui qui est complètement cuit
Et qui s’prend pour le roi

Jacques Brel n’aime pas ces gens, non monsieur. Brel refuserait et condamnerait l’attitude méprisante des élus parlementaires belgo-marocains envers leurs électeurs issus de la diaspora marocaine de Bruxelles, qui, une fois élus, leur disponibilité et bienveillance affichées durant les campagnes électorales s’effacent.

Si Jacques Brel était encore vivant, il aurait exprimé son désaccord et sa condamnation face à l’attitude méprisante de la part des élus belgo-marocains envers leurs électeurs belges,d’origine marocaine ou pas.

L’« abbé Brel » aurait écrit une chanson pour condamner ces élus arrivistes et opportunistes ! Il aurait dénoncé ces marchands de marketing politique ethnique, lui qui aimait tellement le Maroc. Effectivement, peu de personnes connaissent sa relation avec le Maroc, lui étant une intime source d’inspiration : par l’expérience d’un voyage entre Tanger et Casablanca, sur une route de mauvaise qualité, lui vinrent de nouvelles inspirations lyriques. Ce sont quelques vers de La Valse à mille tempsqu’il trouvera dans le taxi à l’arrière de la bagnole », relate ainsi Hervé Meillon dans son beau livre, Jacques Brel couleurs Maroc. Plus loin, on trouve deux petites anecdotes, l’une sur la chanson du port d’Amsterdam écrite au port de Mohammedia, ou encore, une autre histoire de cet habitant de Meknès. Ce dernier ne parle pas un mot de français et pourtant, il fredonne du Brel à longueur de journée. « Il est gardien d’un immeuble au Maroc comme cela se fait souvent. Il n’a qu’une cassette, celle de Jacques Brel. Il l’écoute en boucle et il chante 10 chansons de Brel, par cœur, en français ».

Quand on a que l’amour du Maroc.

Notre cher Brel n’avait pas que l’amour de la Belgique mais aussi celui du Maroc, sa figure étant adulé autant par les Marocains que les Belges. Sensible aux inégalités et à l’injustice sociale, il utilisait sa musique et ses paroles pour critiquer les comportements discriminatoires ou méprisants…Dans les circonstances dont je vous assure le témoignage, il aurait sans vergogne cassé cette radio qui diffusait une de ces chansons les plus engagée… « ces gens-là » ! Ce soir, je me trouvais à Bruxelles dans un assez chic café restaurant, au grès d’un diner professionnel en plein Ramadan. Il m’aurait plu de voir Jacques Brel rentrer et casser la « radio » (sûrement une playlist sur Spotify depuis un téléphone), non pas parce quil serait contre Spotify ou autres plateformes…

Mais bien parce qu’un groupe d’élus belgo-marocains dinaient à quelques mètres de notre table dans ce même restaurant, entonnant une chanson de Brel, « Ces gens », avec un verre à la main…Oui monsieur, un verre de vin! Vous vous dites : maisils sont libres, et nous sommes en Belgique ! L’aberration d’une telle situation, c’était que le serveur était un de leurs électeurs, et sans lui, jamais je n’aurais écrit cet article, car l’événement d’unverre de vin n’en est pas un ; aucune chance que je traite au sujetde pinard en plein Ramadan… D’autres diront que chacun est libre de boire quand lui vient la soif. Ce n’était donc tant l’exubérance de la boisson qui outrait le serveur, mais bien les paroles de la chanson dans leurs bouches : les entendre chanter Brel, quelle hypocrisie. Voilà pourquoi Monsieur Brel aurait cessé une telle offense à son œuvre. Le serveur me parle sans forcément s’adresser à moi personnellement, et sans se poser la question si oui ou non je comprenais ses propos en arabe : « darija », ou bien, « si Jacques vous entendait, il sortirait de sa tombe ». Du reste de son service, il portait un regard noir aux élus.

Entre l’entrée et le dessert, j’eu enfin le droit à une explication bien détaillée sur ces clients ; les fameux élus ; tout en m’expliquant la relation de mépris de ces derniers vis à vis deleurs électeurs d’origine marocaine, fatale désillusion concernant leurs attentes. Il me raconta qu’une fois élu, ildevient difficile et compliqué de les avoir : aucun moyen de les joindre, le numéro de téléphone est changé ou géré par un assistant…

Ce Monsieur, serveur belge d’origine marocaine, se considère comme le « pigeon type ». Il pu assister à des scènes où un des élus faisait semblant de ne pas parler arabe…Disons que cela peut arriver. Mais que l’élu prétende qu’il y a erreur sur sapersonne alors quun des membres de la diaspora, son propre électeur, l’interpelle, c’était de trop pour lui, de voir ainsi ses frères de la diaspora traités comme des lépreux. Cette réponse relève d’une flagrante cocasserie. Tout compte fait, c’est une bonne réplique. Chers électeurs, à votre place, à la prochaine élection, ne faites pas d’erreur : mettez le bon bulletin à la poubelle et faites un choix d’élus qui vous méritent.

« Si jacques Brel était là, il leur interdirait de chanter ou de mettre les paroles de ses chansons dans leurs bouches et leur rappellerait leur bêtise et attitude. Cela, bien parce quils ne mesurent pas le sens de ses paroles. » me confiait le serveur

Manifester de la bienveillance envers leurs électeurs pendant la campagne électorale pour ensuite les négliger une fois élus.
Un comportement courant dans de nombreux pays. Il est important que les électeurs restent vigilants et exigent des élus qu’ils honorent leurs engagements et représentent véritablement les intérêts de tous leurs électeurs, y compris ceux issus de la diaspora. Après tout, ne s’agit-il pas du fondement même de la représentation électorale ?
Il demeure pertinent d’exprimer son mécontentement face à de tels comportements et de demander des comptes aux élus. L’engagement civique et le dialogue ouvert sont essentiels pour promouvoir la transparence, la responsabilité et l’amélioration du système politique.

Cher Serveur du restaurant, éternel amoureux de Jacques Brel, j’ai adoré votre professionnalisme autant que votre poignanteaffection (que vous affichez) pour les royaumes Belge et Marocain, ceux que vous portez dans votre cœur à l’image des lions de l’atlas.
Oui, il faut un grand cœur pour porter les deux

Avec ces lignes je souhaite exprimer toute ma solidarité et ma sympathie à vous, ainsi qu’à la communauté marocaine en Belgique.

Ces gens-là, monsieur, sont bons à égorger les chats.

Albert Waed, « libre penseur » franco-marocain.

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