Parlement européen: un mois après le scandale de corruption, un premier vote exceptionnel contre le Maroc

La rédaction

Les eurodéputés voteront la semaine prochaine une résolution sur les droits humains au Maroc. Rien à voir, à première vue, avec le scandale de corruption. Mais jusqu’ici le Maroc avait toujours été épargné par le Parlement européen.
Une digue a sauté au Parlement européen. Pour la première fois en 25 ans, les eurodéputés vont débattre en séance plénière des droits humains au Maroc. Jusqu’à présent, aucun texte condamnant le royaume chérifien n’avait passé la rampe des discussions entre groupes politiques. Mais après le récent scandale de corruption qui frappe l’institution européenne, les lignes ont bougé et une résolution d’urgence sera soumise au vote mardi prochain.´

Le cas d’Omar Radi sera donc discuté dans l’hémicycle de Strasbourg. Ce journaliste marocain, critique du pouvoir royal, a été emprisonné et condamné en 2021 pour des accusations de viol et d’espionnage. Amnesty international a dénoncé un procès inéquitable. Rien à voir, à première vue, avec le scandale de corruption. Mais jusqu’ici le Maroc a toujours été épargné par des textes critiques.

Le groupe politique des sociaux-démocrates S&D, dont plusieurs membres sont cités dans l’affaire, a poussé la nouvelle résolution avec The Left. Une position inhabituelle, selon l’eurodéputé The Left Miguel Urban. « Pendant 25 ans, une majorité du groupe socialiste a eu une position pliée aux intérêts du Maroc », dénonce-t-il. « Mais pas seulement eux : également le PPE et Renew dans leur grande majorité. Car pour la grande coalition néolibérale qui dirige le Parlement, le Maroc a toujours été “l’enfant gâté” de la politique étrangère européenne en raison du chantage permanent qu’il exerce à travers son rôle dans le contrôle des flux migratoires, du terrorisme et d’autres éléments géostratégiques. »

« Le changement actuel s’explique sans doute par le MoroccoGate et l’impossibilité de s’opposer à ce débat sans risquer d’être publiquement montré du doigt comme servant les intérêts d’une autocratie extérieure », juge l’eurodéputé Miguel Urban.

Selon un porte-parole du S&D, ce projet de résolution sur les droits humains au Maroc était en cours d’élaboration depuis un moment, sans pouvoir donner de précisions. Le S&D tient à rappeler que « le groupe a demandé et soutenu plusieurs résolutions d’urgence sur le Maroc ces dernières années », pointant le cas du journaliste marocain Maati Monjib ou encore l’utilisation des mineurs par les autorités marocaines dans la crise migratoire de Ceuta.

Le Maroc épargné

Un mois après les premières secousses du scandale de corruption, « un grand tabou politique demeure au Parlement européen sur l’implication du Maroc, malgré les articles dans les médias », estime une source au sein de l’institution. « Mais cette résolution ouvre une brèche. » Si les premières révélations du Soirn’évoquaient que le Qatar, le travail des enquêteurs se dirige également vers cet allié stratégique de l’Union européenne au Maghreb. Pier Antonio Panzeri, considéré dans les couloirs du Parlement comme « l’ami du Maroc », est soupçonné d’avoir été corrompu par Rabat.

Lors de la séance plénière du mois de décembre, les eurodéputés avaient dénoncé à la quasi-unanimité les faits de corruption présumés. Une résolution avait ainsi été votée, « dénonçant avec la plus grande fermeté les tentatives présumées du Qatar d’influencer » des (ex-)membres de l’institution. Mais le texte restait muet sur le Maroc alors que seules des bribes d’informations mentionnaient son implication. Au moment de la négociation du texte, le groupe The Left avait demandé à intégrer les accusations contre le royaume chérifien. Mais une large majorité s’était à l’époque dégagée pour écarter cet amendement.

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