En Algérie, des intellectuels appellent au départ du président Bouteflika

Dans un appel publié dans le quotidien El Watan, six intellectuels estiment qu’une élection présidentielle anticipée serait une première étape pour sauver l’Algérie.
Le politologue algérien Mohamed Hennad avait durablement renoncé à s’exprimer, jugeant « trop déprimant » l’état de son pays. Il est finalement sorti de son silence. Si le système politique algérien agonise depuis plusieurs années, à l’instar de son président, le politologue estime qu’une étape supplémentaire a été franchie, et que l’Algérie est entrée dans une « crise aiguë de gouvernance ».

Avec cinq intellectuels, il a cosigné un appel « Pour l’organisation d’une élection présidentielle anticipée : une exigence aujourd’hui vitale pour le pays ! »

« Lundi, Abdelaziz Bouteflika n’a pas pu rencontrer le président vénézuélien Nicolas Maduro en visite officielle en Algérie. D’autres dirigeants, telle la chancelière allemande Angela Merkel, ont annulé leur venue, le président n’étant pas en état de les recevoir. Le président est absent depuis trop longtemps », s’inquiète Mohamed Hennad. Cette situation est « porteuse de grands périls », déclarent les signataires qui réclament que le quatrième mandat d’Abdelaziz Bouteflika, censé courir jusqu’en avril 2019, soit écourté et que le président, diminué depuis son accident vasculaire cérébral d’avril 2013, puisse tranquillement finir ses jours.

« Jamais la Cour constitutionnelle n’appliquera l’article 102 de la Constitution Algérienne pour déclarer “l’état d’empêchement” du président. Elle n’est qu’une instance d’apparat. Il faut que dans un sursaut de dignité et de responsabilité, le président renonce à ses fonctions », escompte Mohamed Hennad.

« Un système pas réformable de l’intérieur »

Le limogeage sans explication du premier ministre Abdelmadjid Tebboune le 15 août, moins de trois mois après sa nomination pour remettre en selle le vieux routier de la politique Ahmed Ouyahia, atteste de l’exacerbation des « luttes d’appareils et de clans », selon les termes de l’appel. « Il y a tout lieu de penser que ce sont les clans autour du président qui désignent et démettent le premier ministre », estime le politologue. Or celui-ci avait mandat de lutter contre la corruption, de séparer le politique et l’argent.

Les signataires se gardent de naïveté, précisant qu’ils « sont loin de croire qu’une élection présidentielle anticipée constituera la solution à l’impasse politique dans laquelle se trouve le pays ». Mais « il y a urgence à sortir de ce statu quo mortifère », justifient-ils.

Reste que, pour le sociologue Nacer Djabi, « le système algérien n’est pas réformable de l’intérieur ». « Nous disposons de toutes les institutions, mais aucune ne fait son travail et n’est susceptible d’inspirer une réforme, les partis politiques sont faibles et inopérants, les élections ne changent rien », égraine-t-il. La société civile elle-même est déstructurée. « La rue est vide au sens politique du terme, et personne ne s’accorde sur une sortie de crise », poursuit Nacer Djabi, qui veut tout de même croire qu’une initiative finira par faire boule de neige.

 

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